Page:Sand - Valvèdre.djvu/237

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ture, parlant du papillon qui passait à propos du fucus de la fontaine, et du grain de sable à propos de la guêpe. Adélaïde répondait au lazzi par une moquerie plus forte et décrivait toutes choses sans se laisser distraire. Elle s’amusait aussi à embarrasser la mémoire ou la sagacité de l’enfant, quand celle-ci, se croyant sûre d’elle-même, débitait sa leçon avec une volubilité dédaigneuse. Enfin, aux questions imprévues et hors de propos, elle avait de soudaines réponses d’une étonnante simplicité dans une étonnante profondeur de vues, et l’enfant, éblouie, convaincue, parce qu’elle était admirablement intelligente aussi, oubliait son espièglerie et son besoin de révolte pour l’écouter et la faire expliquer davantage.

La victoire restait donc à l’institutrice, et la petite rentrait au logis ferrée tout à neuf sur ses études antérieures, l’esprit ouvert à de nobles curiosités, embrassant sa sœur et la remerciant après avoir mis sa patience à l’épreuve, se réjouissant de pouvoir prendre une bonne leçon avec son père, qui était le docteur suprême de l’une et de l’autre, ou avec Henri, le répétiteur bien-aimé ; enfin disant pour conclure :

— J’espère que tu m’as assez tourmentée aujourd’hui, belle Adélaïde ! Il faut que je sois une petite merveille d’esprit et de raison pour avoir souffert tout cela. Si tu ne me fais pas une romance ce soir, il faut que tu n’aies ni cœur ni tête !

Ainsi Adélaïde faisait à ses moments perdus, le soir en s’endormant, ces vers qui m’avaient bouleversé