Page:Sand - Valvèdre.djvu/272

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— Dis ! dis vite !

— Je ne veux rien accepter de M. de Valvèdre. Il est généreux, il va m’offrir la moitié de son revenu ; je ne veux même pas de la pension alimentaire à laquelle j’ai droit. Il me répudie, il me dédaigne, je ne veux rien de lui ! rien, rien !

— C’est justement la condition que j’allais poser aussi, m’écriai-je. Ah ! ma chère Alida ! combien je te bénis de m’avoir deviné !

Il y avait plus d’esprit que de sincérité dans ces derniers mots. J’avais bien vu qu’Alida avait douté de mon désintéressement : c’était horrible qu’à chaque instant elle doutât ainsi de tout ; mais, en ce moment-là, comme il y avait aussi en moi plus de fierté blessée par le mari que d’élan véritable vers la femme, j’étais résolu à ne m’offenser de rien, à la convaincre, à l’obtenir à tout prix.

— Ainsi, dit-elle, non pas vaincue encore, mais étourdie de ma résolution, tu me prendrais telle que je suis, avec mes trente ans, mon cœur déjà dépensé en partie, mon nom flétri probablement par le divorce, mes regrets du passé, mes continuelles aspirations vers mes enfants, et la misère par-dessus tout cela ? Dis, tu le veux, tu le demandes ?… Tu ne me trompes pas ? tu ne te trompes pas toi-même ?…

— Alida, lui dis-je en me mettant à ses pieds, je suis pauvre, et mes parents seront peut-être effrayés de ma résolution ; mais je les connais, je suis leur unique enfant, ils n’aiment que moi au monde, et je