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IX


Depuis trois mois, nous vivions cachés dans une de ces rues aérées et silencieuses qui, à cette époque, avoisinaient le jardin du Luxembourg. Nous nous y promenions dans la journée, Alida toujours enveloppée et voilée avec le plus grand soin, moi ne la quittant jamais que pour m’occuper de son bien-être et de sa sûreté. Je n’avais renoué aucune des relations, assez rares d’ailleurs, que j’avais eues à Paris. Je n’avais fait aucune visite ; quand il m’était arrivé d’apercevoir dans la rue une figure de connaissance, je l’avais évitée en changeant de trottoir et en détournant la tête ; j’avais même acquis à cet égard la prévoyance et la présence d’esprit d’un sauvage dans les bois, ou d’un forçat évadé sous les yeux de la police.

Le soir, je la conduisais quelquefois aux divers théâtres, dans une de ces loges d’en bas où l’on n’est pas vu. Durant les beaux jours de l’automne, je la menai souvent à la campagne, cherchant avec elle ces endroits solitaires que, même aux environs de Paris, les amants savent toujours trouver.

Sa santé n’avait donc pas souffert du changement de ses habitudes, ni du manque de distractions ; mais, quand vint l’hiver, le noir et mortel hiver des grandes