Page:Sand - Valvèdre.djvu/361

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au moment où, encouragé et renaissant à l’espérance, Valvèdre s’apercevait qu’il n’est pas aimé comme il aime ! Adélaïde est un bien autre mythe que lui ! Cette fille qui a l’air si heureux, l’œil si pur, le caractère si égal, l’esprit si studieux, la joue si fraîche, que ni le désir, ni l’espérance, ni la crainte ne semblent pouvoir atteindre ; cette Andromède souriante au milieu des monstres et des chimères, sur son rocher d’albâtre inaccessible aux souillures comme aux tempêtes… pourquoi à vingt-six ans n’est-elle pas mariée ? Elle a été demandée par des hommes de mérite placés dans les conditions les plus honorables, et, malgré les désirs de sa mère, malgré mes instances, malgré les conseils de Juste et de ma femme, elle a souri en disant : « Je ne veux pas me marier ! — Jamais ? lui a dit un jour Valvèdre. — Jamais ! »

— Dis-moi, Henri, Alida vivait-elle alors ?

— Oui.

— Et, depuis qu’elle n’est plus, Adélaïde a-t-elle répété jamais ?

— Maintes fois.

— Valvèdre présent ?

— Je ne sais plus. Tu m’y fais songer ! il était peut-être loin, elle avait peut-être reperdu l’espérance.

— Allons, allons ! tu n’as pas encore assez bien observé. C’est à moi de travailler à déchiffrer la grande énigme. La philosophie stoïcienne, acquise par l’étude de la sagesse, est une sainte et belle chose, puisqu’elle peut alimenter des flammes si pures, si constantes et