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pleine lune ou croissant

Qu’on surprenne le pas d’un frelon qui piétine
Sur la mamelle longue et mauve des glycines
Et le doux froissement de l’arbre qui s’endort.
La nuit somnolera dans un silence d’or ;
On entendra les chars s’engluer dans l’ornière,
Le soleil ébranler son moulin de lumière,
Bruiner les bouleaux, chuchoter les ajoncs
Et sous les marronniers tomber mat les marrons
Quand, pareille au verdier, la touffe de prairie
S’ébouriffe et s’égoutte après un temps de pluie.
La terre qui regarde aux fleurs de ses jardins
Jouer la lune blanche et le petit matin
Nous conduira dans l’air où sa valse s’élance.
Les bras arrondiront, vivants, leurs fermes anses,
Les baisers de la chair se mouilleront d’amour,
La pêche aura son eau, sa courbe, son velours
Et le frémissement qui la berce en sa feuille :
On palpera le vers comme un raisin qu’on cueille.