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des lignes, ces points ou notes tirèrent leur signification de l’une de ces lettres placées en tête pour indiquer le nom du point correspondant.

La figure de nos clefs rappelle leur origine : on reconnaît encore les rudiments de la lettre qui, défigurée sous la main des copistes, a fini par prendre la forme que nous voyons aujourd’hui à la clef.

Ce n’est pas au hasard que les notes fa, ut et sol ont été choisies pour clefs. Ces trois notes formaient les points fondamentaux de l’ancienne échelle, comme ils sont les cordes génératrices de notre échelle diatonique (§ 120) : c’est à ces trois sons qu’on appliquait tour à tour le nom d’ut dans les transpositions de la série des syllabes ; mutations d’où résultaient les muances (voyez la note suivante).


NOTE E. — Étymologie des mots bémol et bécarre.


Au moyen âge, l’échelle musicale n’était que le diagramme[1] des Grecs, augmenté de quelques sons à l’aigu et d’un son au grave (note C).

Cette échelle fut divisée, non plus en tétracordes (quatre cordes), comme celle des Grecs, mais en hexacordes (six cordes). On appliqua à chaque hexacorde, ou série de six sons, les six noms ut, , mi, fa, sol, la (note B).

Dans l’ancienne échelle, une seule note avait deux manières d’être : la note b, qui, tantôt correspondait à notre si naturel, tantôt à notre si bémol.

Or, comme nous l’avons vu (note B), les noms syllabiques donnés aux notes n’ayant été imaginés que pour faciliter le souvenir des rapports des sons dans leur intonation, les mêmes noms devaient toujours représenter les mêmes rapports d’intervalles : c’est-à-dire que toujours ut ré, ré mi, fa sol, sol la, indiquaient la distance d’un ton ; mi fa désignaient toujours un demi-ton.

En conséquence, les six syllabes ut, , mi, fa, sol, la, furent appliquées aux sons de la manière suivante :

Lettres qui autrefois désignaient
les sons.
c d e f g a b
  : : : : : : :
Noms syllabiques des mêmes sons. ut mi fa sol la  


On voit que la note b, dont l’intonation variait, n’est pas comprise dans l’hexacorde, et qu’elle n’a pas de nom.

Cependant, quand, dépassant les bornes de cet hexacorde, la mélodie réclamait l’emploi de la note b, alors la série des syllabes était déplacée, et, suivant l’intonation que devait recevoir cette note b, la syllabe ut, première de la série, s’appliquait, soit à la note g, soit à la note f. Dans le premier cas, le nom de mi se rapportait à la note b qui formait ce que nous appellerions aujourd’hui si bécarre ; dans le second cas, cette même note b prenait le nom de fa, et donnait le son de notre si bémol. De cette manière, la note b était nommée, et les syllabes mi fa servaient toujours à désigner les notes entre lesquelles le demi-ton se trouvait placé.

L’échelle contenait de la sorte sept hexacordes, divisés en durs, mols et naturels.

  1. Étendue générale des sons du système des Grecs.