Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/120

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Alors, Virginie se sauva en hurlant. Et, de ses forces décuplées par la terreur, elle parvint à mettre à flot le mauvais canot dont Kergrésan se servait pour la pêche. Elle prit les avirons, et, au hasard, car elle était incapable de raisonner sa route, elle s’écarta vers le chenal, favorisée par l’ébe, et se confiant aux eaux.

Elle dut longer les Chrétiens et le rocher du Bœuf, qu’on connaît ici sous le nom de Roc’h Egen, et Clossen Bras. On prétend qu’un schooner à la cape, désemparé par la furie des lames, aperçut cette barque dans la nuit, près de Les Las, avant qu’elle n’entrât dans la Helle. On supposa que ce canot était celui d’un navire en perdition, et, qu’abandonné, il voguait à la dérive.

Dans sa fuite irraisonnée, Virginie avait pensé, sans doute, aller à Ouessant. Le courant du Four l’entraîna vers le large.


Deux jours après, au matin, le temps qui s’était un peu calmé permit à des pêcheurs de la cote de partir à la recherche des épaves que charriait la mer. Une barque de Lanildut, montée par trois hommes, recueillit l’embarcation errante et lui passa une amarre. Au fond du canot, Virginie était étendue sans mouvement.