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DE NAVIGATION 16 ACTE DE NAVIGATION n double droit. Cette aggravation cation de l’Acte de navigation, c’est-à-

souvent un double droit. Cette aggravation de l’Acte de navigation a excité plus deplaintes et provoqué plus de représailles que l’Acte lui-même. Gràce aux traités de navigation, le bill des droits a disparu avant l’Acte de navigation lui-même.

Le cinquième objet de l’Acte de navigation était le commerce avec les pays hors d’Europe. Il était réservé complètement au pavillon anglais. La prohibition paraît donc ici plus absolue, puisque le « pavillon de la puissance » même était exclu. Ce n’était pourtant que l’application du principe de l’exclusion des tiers déjà posé pour le commerce avec les puissances européennes. A cette époque, les nations d’Asie, d’Afrique etd’Amérique n’avaient point de marine qui leur fût propre la prohibition aboutissait donc simplement à l’exclusion du tiers pavillon. Par application du même principe, la Moscovie et la Turquie, puissances sans marine, étaient assimilées aux puissances de l’Asie. Le monopole de la marine anglaise était pourtant plus complet à l’égard du commerce avec les pays hors d’Europe. 11 ne portait plus seulement en effet sur les marchandises énumérées comme en cas de commerce avec les pays d’Europe, mais bien sur les produits de toute nature.

Telles étaient les dispositions essentielles de l’Acte de navigation, mais celles-ci en supposaient nécessairement d’autres. Comme l’Acte de navigation créait un monopole pour lamarine anglaise, il fallait définir lanationalité des navires et en régler les conditions. Aux termes de l’Acte, n’étaient considérés comme anglais que les navires appartenant entièrement à des sujets anglais et dont le capitaine et les trois quarts de l’équipage étaient anglais. En ce qui concerne le cabotage, il fallait même que l’équipage fût entièrement anglais. A l’origine, le navire pouvait être de construction étrangère ; plus tard, cette tolérance cessa.

Les dispositions que nous venons d’analyser furent maintenues presque sans changements pendant 130 ans, c’est-à-dire jusqu’à la fin du siècle dernier. Apartir de la guerre de l’indépendance américaine et de la proclamation de cette indépendance, l’Acte de navigation subit au contraire de nombreuses altérations jusqu’au jour où il fut définitivement rapporté (1849).

La déclaration de l’indépendance des ÉtatsUnis créait une situation nouvelle. Les États-Unis américains, devenus puissance indépendante, perdaient leurs anciens privilèges coloniaux et tombaient sous l’appli-

cation de l’Acte de navigation, c’est-à-dire qu’en leur qualité d’État américain, ils étaient exclus de tout commerce avec l’Angleterre. Jamais le nouvel État n’eût consenti à abandonner ainsi aux navires anglais la totalité des transports il eût par voie de représailles fermé ses ports aux navires anglais. Il fallait donc que l’Acte de navigation fléchît. On assimila les États-Unis aux puissances européennes et les navires américains furent admis à importer en Angleterre les produits américains. Pour des motifs analogues, cette dérogation fut étendue plus tard aux anciennes colonies espagnoles de l’Amérique du Sud, devenues États libres, et à la République noire d’Haïti.

L’émancipation de l’Amérique du Nord devait avoir d’autres conséquences. Dans l’intérêt des Antilles anglaises, accoutumées à compter sur les approvisionnements venus de l’Amérique duNord, il fallutautoriser le nouvel État à commercer avec ces colonies. Cette dérogation était plus grave que la première, en ce qu’elle atteignait le principe même de l’Acte de navigation.

A cette époque commença, entre l’Angleterre et son ancienne colonie, une guerre de tarifs qui ne devait cesser qu’en 1815. Les Américains demandaient que le bill des droits ne fût plus appliqué aux marchandises importées sur leurs navires. Le refus de l’Angleterre eut pour conséquence l’adoption par le Congrès américain d’un Acte de navigation correspondant, sous certains rapports, à l’Acte anglais, mais plus élastique en ce que le gouvernement pouvait en suspendre les effets, toutes les fois que des arrangements conclus avec d’autres peuples l’exigeaient. Gràce à cet Acte. toutes relations commerciales cessèren t entre l’Angleterre et l’Amérique, au point que le tonnage anglais dans les ports américains tomba, en 1811 et 1812, à 4,000 tonneaux après avoir dépassé, en 1790, 218,000 tonneaux. Cette situation ne pouvait durer ; la guerre éclata, elle fut heureusement de courte durée et aboutit, en 1815, à un traité de commerce et de navigation, basé sur le principe de la réciprocité et de l’égalité des droits.

L’exemple donné par l’Amérique fut bientôt suivi par d’autres pays. Un traité semblable au traité anglo-américain de 1815 fut conclu en 1823 avec la Prusse. Mais déjà l’Acte de navigation était battu en brèche de toutes parts. L’année précédente, 1822, sur la proposition du ministère, dans lequel se trouvait R. Huskisson, le parlement anglais avait adopté un bill autorisent le gouvernement à conclure, sur la base de la réciprocité, des traités de navigation avec les différentes

4. Modifications successives.


ACTE