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CHAMILLART 375 CHANGE de votre ouvrage. Bien ne vous em- dit-il dans son livre sur le Devoir un succès de votre ouvrage. Rien ne vous empêche de continuer que votre démangeaison à vous faire imprimer ». Boisguillebert ne craint cependant pas de reprendre, sans faire attention à la lassitude visible du contrôleur général, sa correspondance sur le même ton et il l’irrite de plus en plus par ce ton et cette insistance. Le 25 juin 1705 il lui écrit: « Je pris la hardiesse de vous demander, l’année passée, une audience pour vous faire concevoir qu’en deux ou trois heures vous pourriez former 80 millions de hausse dans le produit des peuples envers le roi. » Les lettres ne cessent pas d’arriver au contrôle général; elles y tombent comme la pluie tous les mois, toutes les semaines. Elles se succèdent sans interruption. Chamillart se fâche, il répond le 26 novembre 1705. « Je crois que vous raisonnez fort juste et si vous étiez à ma place vous feriez trouver au roi 80 millions en deux heures de temps puisque vous en êtes persuadé. Ce qui me donne plus lieu d’en être convaincu, c’est la vivacité de votre esprit et sa facilité à m’écrire tous les jours; mais comme je ne vais pas si vite, etc. » Enfin le ministre ne peut plus se contenir « Puisque vous vous adressez encore à moi, après avoir donné au public toutes vos extravagances, le seul bon conseil que je puisse vous donner c’est de brûler vos remarques sur les Mémoires de Sully. Si vous entendez bien ce que je vous veux dire et qui n’est pas difficile à comprendre, vous vous occuperez à l’avenir à rendre la justice et vous renoncerez au gouvernement de l’État. » Enfin, le réformateur infatigable qui demande à soulager les peuples en rehaussant le produit des impôts «parce que je rétablis, dit-il, sur-le-champ quatre fois davantage dans leurs biens », est disgracié; on l’exile, on le ruine et c’est Chamillart, le plus honnête homme du royaume, qui lui donne le coup de grâce. Le contrôleur général du reste était déjà atteint de cette maladie que donnent aux ministres de tous les temps la responsabilité et l’excès de travail quand ils n’ont ni le caractère, ni les facultés physiques suffisamment trempés. Il voyait encore honnêtement, mais il ne voyait plus juste, si tant est qu’il eût jamais vu juste; et s’il avait toujours le sentiment de son devoir, il n’avait plus le moyen de s’éclairer. Son jugement s’était de plus en plus obscurci. L’histoire serait pourtant injuste envers lui si on ne lui tenait pas compte d’avoir mérité cet éloge de M. Jules Simon’: «On raconte de Chamillart, 1. Le devoir, p. 411. dit-il dans son livre sur le Devoir, un trait d’équité qui peut servir de modèle à tous ceux qui disposent de la fortune ou de l’honneur de leurs concitoyens « A une époque où il était encore dans une situation modeste, il avait en effet sacrifié la plus grande partie de ce qu’il possédait pour restituer à un plaideur une somme qu’il lui avait fait perdre. Il avait négligé de produire une pièce décisive, oubliée par lui dans le dossier. Voltaire a plaidé pour Chamillart les circonstances atténuantes et la postérité les a accordées. « On lui reprochait beaucoup de fautes. Le public, d’autantplus sévère qu’il souffrait,ne songeait pas qu’il y a des temps malheureux où les fautes sont inévitables1». Mais les circonstances atténuantes pour Chamillart sont accablantes pour Louis XIV. LÉON SAY. CHANGE, CHANGES. SOMMAIRE . Définitions. . Fonction des changes. . Cote des changes. . Causes qui agissent sur le prix des changes. a. EFFETS COURTS. b. EFFETS LONGS. . Définitions. Le mot change se prend dans plusieurs acceptions, voisines les unes des autres, qu’il faut distinguer avec soin. Le change est d’abord la conversion en monnaie étrangère d’une somme d’argent en espèces nationales, ou réciproquement, la conversion en monnaie nationale d’une somme d’espèces étrangères. Par extension, on a appelé change ou opé- ration de change les remises de fonds d’une place sur une autre place, étrangère ou nationale, en vue soit d’effectuer un payement, soit de faire une avance, que la remise soit réalisée au moyen de numéraire, de papier de commerce, de titres ou de valeurs quelconques. Les effets de commerce ainsi employés à remettre des fonds sur une autre place portent aussi le nom de changes. Ces changes ont sur les grandes places commerciales un marché régulier où leurprix est coté. Ce prix est encore désigné sous le nom de change. Enfin, la commission prélevée par l’inter- médiaire dans l’opération de change est également appelée change. On emploie quelquefois dans le même sens le mot agio (voy. ce mot). Cet usage est mauvais; l’agio est l’écart en prime ou en perte d’une valeur par rapport au pair. . Voltaire, Siècle de Louis XIV, t II, p. 72.