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59- APPROPRIATION

APPROPRIATION. le

1. Exposé du sujet. d’ 2. Deux régimes idéaux. 3. Direction de l’industrie. Attribution des fonctions.

4. Formation et conservation des capitaux. te 5. Énergie du travail. 6. Distribution des produits. 7. Art industriel. S. Lois de la population. ti

9. Les fonctions de défense. 10. Comparaison d’ensemble. L 11. Des régimes concrets d’appropriation. d 12. Conclusion. u L’étude des lois d’appropriation des ri- d chesses est la principale partie de l’économie c ,politique. Nous disons appropriation et non n distribution ou répartition, comme on dit habi- e tuellement, parce que ces mots laissent supposer 1 ! existence d’un distributeurou d’un répartiteur et manquent ainsi d’exactitude, lorsque l’appropriation résulte, comme dans presque i tous les cas, de l’acte du producteur lui-même. t Cette étude comprend aussi ce qu’on appelle c quelquefois circulation des richesses, parce t que les richesses ne circulent jamais pour 1 circuler, mais pour être appropriées, de telle sorte que la circulation n’est qu’un détail de l’appropriation. Il est bien entendu que nous ne pren- drons pas ici le mot appropriation dans le sens restreint et peu précis qu’on lui donne quelquefois. Nous le prenons dans son ac- ception la plus étendue attribution à chacun de la part de richesses qui lui appartient et dont il peut disposer à son gré.

1. Exposé du sujet.

Il est de nécessité absolue que toutes les richesses incessamment créées par l’industrie soient incessamment appropriées à chacun des individus dont le genre humain se compose. L’appropriation des richesses est donc un phénomène nécessaire, permanent, universel, susceptible, par conséquent, d’être l’objet d’une étude scientifique. A ce phénomène se rattache étroitement celui de l’arrangement ou organisation du travail des hommes qui produisent des richesses et les consomment continuellement. Étudier l’appropriation des richesses, c’est donc étudier un ensemble d’arrangements humains.

Si l’appropriation est un phénomène nécessaire et permanent, il n’en est pas de même des formes qu’elle prend chez les divers groupes d’hommes et dans les temps divers. Ces formes ont subi des variations sans nombre et qui continuent indéfiniment. On ne peut entreprendre de les étudier l’une après l’autre. Mais on peut les étudier dans

SOMMAIRE le

leurs principes, au nombre de deux seulement, dont l’action est continue et qui sont les éléments constitutifs de toutes les formes d’appropriation passées, présentes et imaginables.

En effet, il est de nécessité absolue que toute portion de richesses soit à la disposition de son auteur ou d’une autre personne. On ne peut concevoir une troisième alternative et tout arrangement d’appropriation n’est qu’une combinaison de ces deux principes. Lorsque l’individu dispose de son travail et du produit de son travail, il est libre là où une autre personne dispose de ce travail et des produits de ce travail, il est sous le contrôle, sous l’autorité d’autrui. Nous donnerons le nom de liberté au premier principe et celui d’autorité au second.

2. Deux régimes idéaux.

Pour étudier l’action de ces deux principes, nous imaginerons deux régimes d’appropriation différants en ceci que dans l’un, le principe d’autorité règnera autant que possible, tandis que dans l’autre, la liberté sera développée autant que nous pouvons l’imaginer. Ce sont deux régimes purement idéaux. Un régime d’autorité peut tout embrasser: c’est le communisme complet, dans lequel l’autorité souveraine disposerait des personnes et des choses. Un couvent catholique peut donnerune idéedecerégime. Un régime de liberté ne peutêtre aussi simple, puisque, pour étendu qu’on le suppose, il faut toujours une autorité pour protéger les personnes et les biens contre la violence et la fraude, faire observer les contrats et, lorsqu’il y a litige entre les particuliers, rendre à chacun ce qui lui est dû. Ce service de justice et police est rémunéré par autorité. Mais on peut imaginer un état social dans lequel la liberté du travail et des contrats soit infiniment plus étendue qu’elle ne l’a été dans aucune société connue. Cet état et le communisme sont les deux régimes idéaux qu’il s’agit d’étudier, surtout par comparaison. Au premier regard que nous jetons sur le régime d’autorité, nous sommes étonnés de voir qu’il n’obéit à aucune loi fixe. Le caprice du gouvernement domine tout, parce que les gouvernants qui ordonnent les actes ne sont pas directement responsables des conséquences et peuvent être mus par des désirs divers. On ne peut donc étudier ce régime que dans ses tendances, tellesqu’elles résultent des inclinations primitives et indestructibles de l’homme.

Au contraire, le régime de la liberté est dominé par une loi impersonnelle qu’on peut étudier et connaître, c’est la loi de l’échange


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