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ont éloignés et décider les étrangers à venir compléter le nombre qu’il nous en faut ; attirer l’or et l’argent, au lieu de les faire filera l’étranger, et enfin, lever les droits de douane et les transmettre directement au trésor ». On trouve aussi, en germe, dans les deux opuscules cités, l’idée, mais l’idée seulement, de la nécessité de l’unité des poids et mesures : <f Pour le bien de l’Estat, y est-il dit, il ne devrait y avoir en ce royaume qu’un poids, aulne et mesure, chose d’une très grande importance, facile à establir et qui empêcher oit grand nombre de fraudes et tromperies ». La fin est d’un libre-échangiste. « Toutes ces raisons sont mises en avant, pour montrer le bien d’établir le commerce général, et par ce moyen recouvrer tout ce que nous aurons d’affaires des étrangers, sans bourse délier, et par le seul échange et troc des nôtres ; chose si facile qu’elle ne se peut davantage ».

Ces idées, peu à. peu répandues parmi les gens de négoce ou de gouvernement, avaient appelé sur lui l’attention de Henri IV. En 1601 , il l’adjoignit à une commission nommée pour « vaquer au rétablissement du commerce et manufactures du royaume ». Bientôt cette commission, qui fut en réalité la première chambre de commerce qui ait fonctionné en France, reçut plein pouvoir pour la propagation du mûrier ; c’est à cette occasion que Laffemas’fut nommé contrôleur général du commerce.

Voilà donc le tapissier, le tailleur d’habits, le valet de chambre, le négociant, l’écrivain improvisé devenu grand dignitaire de l’Etat ! Pour compléter le personnage, disons qu’il se mêlait aussi de poésie. L’un de ses petUs traités se termine par l’exposé de tout son système en quatrains, sonnets, élégies, chansons, etc., le tout dédié pièce par pièce, et même strophe par strophe, aux grands personnages dont il convoitait sans doute 1 appui.

On ignore au juste l’époque de sa mort. On doit la placer entre 1612 et 1623. Laffemas (Isaac), son fils, fut avocat au parlement de Paris. Entré au conseil d’État il y devint maître des requêtes puis conseiller. Il occupa le poste de lieutenant civil de Paris. Ilmourut en 1 650. On connaît de lui une Histoire du commerce deFrance ; quelques Lettres au cardinal Mazarin, et une fantaisie en vers burlesques : les Deux Fêtes de Pâques sans trébuchet.

E. de Latreille.

LAFFITTE (Jacques), né à Bayonne le 24 octobre 1767, mort à Paris le 26* mai 1844. Né d’un simple charpentier, père d’une nombreuse famille, il entra presque enfant dans le commerce et vint tout jeune à Paris, où il fut accueilli par le banquier Perregaux. Il devint bientôt son caissier principal, puis son associé, son successeur et plus tard son exécuteur testamentaire. Aussi heureux qu’honnête dans toutes ses spéculations, indépendant sous tous les régimes qu’il vit se succéder de 1789 à 1830, large jusque à la prodigalité, surtout dès qu’il s’agissait de patriotisme, juge ou président à la chambre ou au tribunal de commerce, député de la Seine, il ne joua de vrai rôle politique que dans la révolution de juillet 1830 ; c’est lui qui offrit au duc d’Orléans « la couronne ou un passeport ». Devenu roi grâce à lui, Louis-Philippe crut le récompenser en lui confiant le ministère des finances, qu’il garda quatre mois et huit jours. Ces quelques mois de politique active avaient suffi à ruiner Laffitte, lui qui avait été, à deux reprises, régent ou gouverneur de la Banque de France, sans jamais en vouloir toucher les 100 000 francs d’indemnité, qui avait reçu et rendu, sans intérêts, les dépôts de Napoléon, de Louis XVIÏÏ et des d’Orléans. Une souscription nationale lui racheta son hôtel, où il put reprendra, fort âgé, les affaires qu’il possédait si merveilleusement. II fonda la Caisse de l’industrie, si souvent imitée depuis, les fameuses messageries Laffitte et Gaillard, et mourut à la peine, à soixante-dix-sept ans. Il avait fait, comme il le disait gaiement, des rois et des princesses (sa fille avaient épousé un prince de La Moskowa) et mourut roturier, simple chevalier de la Légion d’honneur. Son cortège funèbre fut celui d’un roi, escorté déplus de 25 000 personnes. Comme homme, a dit de lui Cormenin, qui n’était pas tendre pour ses contemporains, sa vie privée serait un cours de morale en action.

Comme banquier, homme politique ou ministre, Laffitte a rendu d’immenses services, relevant le crédit public en 1815, soutenant la conversion Villèle aux dépens de sa popularité, demandant, à la tribune, la pleine exposition du budget. Trop absorbé par les affaires ou par les événements, il n’a laissé, comme économiste, que quelques discours ou brochures antérieures à 1830 ; il faudrait presque dépouiller tout le Moniteur pour y retrouver ses idées et ses observations en matière économique et financière. Il a publié : Opinion sur le projet de loi relatif aux finances pour ’18 il. [Séance du 1 er février 1817], in-8°.

— Opinion sur le projet de loi des finances en 4848. [Séance du 31 mars 1818], in-8 .— Opinion sur les finances de i8%%. [Séance du 15 avril 1822], in-8°. — Réflexions sur Vétat delà rente et sur Vétat du crédit, 1824, in-8°. —