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Bibliographie.

D’Addtffbet, Souvenir.- : sur le baron Louis. Système financier de la France. — Comte de Saiki-Gkicq, discours prononcé à la Chambre des pairs en 1S38. — Calmon, Histoire parlementaire des finances de la Restauration. — Le Correspondant, avril et juin 1866, « le baron Louis ». — Tuhheau-Dakginj Histoire de la monarchie de Juillet. LUXE. — Ce mot, qui s’applique à des faits purement relatifs, et dont les éléments sont très complexes, échappe à toute définition exacte et scientifique. Aussi les économistes des deux derniers siècles et ceux même de notre temps ont-ils beaucoup discuté sur les avantages et les inconvénients du luxe, sans pouvoir parvenir à une formule définitive et satisfaisante.

Steuart dit que le luxe est l’usage du super /lu, et la définition de Smith ne diffère guère de celle de Steuart. Mais l’économie politique n’admet point, dans un sens absolu, cette distinction du superflu et du nécessaire, parce qu’il n’existe aucun moyen pratique de la faire ressortir des faits : tel objet de consommation, jugé nécessaire dans un certain état de civilisation, serait à juste titre considéré comme superflu dans un état de civilisation moindre ; les dépenses considérées comme nécessaires aux personnes qui jouissent d’une grande fortune seraient condamnées comme excessives et extravagantes chez des particuliers de fortune moyenne. « 11 n’existe guère, dit Mac Culloch 1 , un seul article, parmi ceux regardés aujourd’hui comme indispensables à l’existence, ou une seule amélioration d’une nature quelconque, qui n’ait été dénoncé, à son apparition, comme une superfluité inutile, ou comme étant en quelque sorte nuisible. Il est peu d’articles de vêtement considérés aujourd’hui comme plus essentiels queles chemises ; cependant la tradition nous a conservé des exemples d’individus mis au pilori pour avoir osé se servir d’un objet de luxe si coûteux et si inutile ! L’usage habituel des cheminées n’exista pas en Angleterre jusqu’au milieu du xYi e siècle, et, dans le discours d’introduction qui précède les Chroniques de Hollinshed, publiées en 1577, on se plaint amèrement du nombre considérable de cheminées élevées nouvellement, de la substitution, aux paillasses, de matelas ou de literie en laine, et de la vaisselle de terre ou d’étain à la vaisselle de bois. Dans un autre endroit, l’auteur se plaint qu’on n’emploie plus que le chêne pour les constructions, au lieu du saule comme on le faisait jadis, et il ajoute : « Autrefois, nos maisons étaient de saule, mais nos hommes étaient de chêne ; mais i. Principes d’Économie politique^ t. II, p. 236. Paris, Guillaumin.

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aujourd’hui nos maisons sont de chêne, nos hommes ne sont pas seulement de saule, mais quelques-uns sont tout à fait de paille, ce qui est un triste changement. » « Un grand nombre de volumes sont remplis de plaintes sur le goût régnant pour le thé, le sucre, le café, les épices et autres jouissances de luxe importées de l’étranger, et l’idée que leur consommation est préjudiciable à l’accroissement de la richesse est encore très répandue. Voltaire, dont les opinions sur de pareilles matières sont la plupart du temps très exactes, a, dans cette circonstance, mis en circulation l’erreur régnante. « Henri IV, dit-il, déjeunait avec un verre de vin et du pain de froment. Il n’usait ni de thé, ni de café, ni de chocolat, tandis que les produits de la Martinique, de Moka et delà Chine sont servis aujourd’hui au déjeuner de lafemme de chambre d’une grande dame. Et si nous songeons que ces produits coûtent à la France au delà de 50 millions par an, nous devons évidemment nous livrer à quelques branches de commerce très avantageuses pour supporter cette perte continuelle. Mais on se procure l’or et l’argent, exportés dans l’Inde et à la Chine, en échange de denrées produites en France ; etpourquel motif a-t-on produit ces denrées ? Évidemment afin qu’elles devinssent un moyen de se procurer le thé, le café, le sucre, etc., qui sont demandés. .. »

J.-B. Say définit le luxe Vusage des choses chères, ou, pour rendre plus exactement sa pensée, Vusage des choses coûteuses, et cette définition imparfaite est peut-être celle qui se rapproche le plus de la vérité, dont elle est encore éloignée. Essayons de définir le luxe, non par une formule, mais par quelques considérations pratiques et par des exemples.

Remarquons d’abord que les consommations reproductives, coûteuses ou non, ne suggèrent jamais l’idée du luxe. Lorsqu’on dit qu’une usine est outillée avec luxe, ou qu’un chemin de fer, un pont, sont construits avec luxe, on entend que la dépense a excédé ce qui était nécessaire, a été faite sans utilité. En général, le mot luxe sert à caractériser uniquement les consommations improductives et personnelles : il emporte une idée de défaveur et de blâme. Dans cette acception, il est difficile de déterminer où le luxe commence et où il finit.

Franklin raconte dans un de ses opuscules l’historiette suivante :

« Le patron d’une chaloupe, qui naviguait entre le cap May et Philadelphie, m’avait rendu quelque petit service, pour lequel il refusa toute espèce de payement. Ma femme,