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les détourner des emprunts et nombre de leurs arguments ne sauraient être reniés par la science économique.

Ils s’élèvent contre les emprunts destinés à une vaine consommation, conseillent la réduction des dépenses et montrent la nécessité de demander au travail et à l’épargne les moyens de pourvoir aux besoins de la vie.

L’Église interdit de bonne heure aux clercs l’usage du prêt à intérêt. Elle proscrivit « les usures laïques » au v* siècle quand le pouvoir pontifical eut pris dans la capitale du monde la place du pouvoir civil. Dans les Gaules, lorsqu’elle eut devant elle une société façonnée par ses soins et des rois barbares dont la conversion était son ouvrage, elle vit la loi civile ratifier les prescriptions religieuses.

La première prohibition législative du prêt à intérêt fut inscrite en 789 dans le capitulaire d’Aix-la-Chapelle. Charîemagne appuyait cette prohibition sur celle formulée par le pape saint Léon dans sa lettre décrétale de 445.

Les conditions économiques de ce temps justifiaient cette mesure et lui donnaient même un certain caractère protecteur et bienfaisant. L’absence presque complète de commerce et d’industrie, une circulation monétaire très rare, des transactions peu nombreuses et conclues sous forme d’échange de troupeaux ou de grains ne permettaient pas d’asseoir le prêt à intérêt sur des bases solides. Il en fut ainsi durant tout le moyen âge : le capital de î 1 artisan suffisait à son industrie naissante et l’agriculture s’alimentait des avances des seigneurs. Les difficultés de circulation du capital enlevaient tout moyen de trouver un emploi productif à l’épargne qui, dès lors, n’était plus un capital mais un simple trésor amassé pour les besoins de l’avenir.

Si la prohibition fut maintenue pendant dis siècles consécutifs, ce n’est pas que le rôle productif du capital soit resté aussi longtemps incompris, mais plutôt par un effet de la puissance de la tradition. Un moment vint cependant où l’éveil du commerce et de l’industrie fit sentir l’utilité du capital et la nécessité de le laisser circuler. On sait comment dès lors, la prohibition fut éludée et que, pendant que la loi civile y apportait des exceptions, les docteurs religieux eux-mêmes, dans une exacte analyse des circonstances qui entourent le prêt, trouvaient précisément, pour justifier l’intérêt, des motifs universellement admis aujourd’hui. . Conséquences sociales et rôle économique de l’intérêt quand il est basé sur la production.

— Les critiques modernes contre l’intérêt. Le coup d’œil que nous venons de jeter sur le passé montre bien que c’est à cause de ses conséquences sociales que l’intérêt a été attaqué. Ces conséquences ont été désastreuses partout où le prêt a été pratiqué dans des conditions anti-économiques et c’est seulement dans les pays et aux époques où il a été ainsi employé qu’il a été suspecté et prohibé. Il serait au contraire facile de montrer que partout où il a été sainement compris et judicieusement utilisé, c’est-à-dire partout où l’emprunt a eu pour but la production, il a donné d’heureux résultats et puissamment contribué à la création et à la diffusion de la richesse.

Cette vérité ressort abondamment de l’histoire des peuples qui ont connu une véritable prospérité économique. Mais nous ne pouvons entrer ici dans les développements qui seraient nécessaires à cette démonstration. Aussi loin qu’on remonte dans le passé, on trouve la circulation et la rémunération du capital servant de levier à la production et au commerce. L’Inde et l’Egypte ancienne, dès le temps de leur splendeur, pratiquèrent le prêt à intérêt. Et de même les Grecs, qui ne furent pas seulement des artistes et des poètes, mais de hardis marins et d’habiles spéculateurs, usèrent du crédit sous toutes ses formes et sous un régime de liberté absolue.

en a été ainsi chez tous les peuples qui 

ont cherché la richesse dans ses véritables sources, c’est-à-dire la production et l’échange : dans les villes hanséatiques (V-Hanse ) dont les comptoirs se ramifiaient dans l’Europe entière, comme au sein de l’étonnante prospérité des républiques italiennes du moyen âge l et dans la commerçante Hollande du xvn e siècle. De même qu’il y avait eu des banques à Athènes, il y en eut à Venise dès 1157, à Barcelone en 1349, à Gênes en 1407, à Amsterdam en 1609, à Hambourg en 1619 et en 1694 en Angleterre (V. Jacques Cœur, Fugger et Médicis). C’est encore au nom de ses conséquences sociales que l’intérêt est attaqué de nos jours. Bien que sa suppression ne soit plus que le rêve de quelques rares esprits chimériques il est intéressant d’examiner ces critiques nouvelles et de voir comment elles sont étayées.

Aussi bien, les motifs mis en avant par les . Dans le budget de la république de Florence, on retrouve, au titre des revenus de la ville, une gabelle sur le ; prêteurs et ttsuriei’s produisant 3000 florins d’or.