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LIVRE TROISIÈME. — CHAPITRE XI.

les capitaux qu’on a imprudemment dissipés, c’est-à-dire, diminuer les dépenses publiques et employer fidèlement les revenus épargnés de cette manière au rachat de la dette. Il n’y a, pour un ministre des finances, aucun talent qui vaille celui de dépenser peu.

Les princes qui, comme les potentats de l’Asie, désespèrent d’avoir un crédit, cherchent à amasser un trésor.

Un trésor est la valeur présente d’un revenu passé, comme un emprunt est la valeur présente d’un revenu futur. L’un et l’autre servent à subvenir aux besoins extraordinaires.

Un trésor ne contribue pas toujours à la sûreté du gouvernement qui le possède. Il attire le danger, et il est rare qu’il serve au dessein pour lequel il a été amassé. Le trésor formé par Charles V, roi de France, devint la proie de son frère, le duc d’Anjou ; celui que le pape Paul II destinait à combattre les Turcs et à les repousser en Asie, favorisa les débordemens de Sixte IV et de ses neveux ; celui que Henri IV réservait à l’abaissement de la maison d’Autriche, fut employé aux profusions des favoris de la reine-mère ; et, plus récemment, les épargnes qui devaient consolider la monarchie de Frédéric II, roi de Prusse, ont servi à l’ébranler.

Entre les mains d’un gouvernement, une grosse somme fait naître de fâcheuses tentations. Le public profite rarement, je n’ose pas dire jamais, d’un trésor dont il a fait les frais : car toute valeur, et par conséquent toute richesse vient originairement de lui.


fin du livre troisième et dernier.