Page:Say et Chailley-Bert - Nouveau dictionnaire d'économie politique, supplément.djvu/211

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


— l’.i  :


LITTIIK


tli’ Idiit iiiipnl sur la consommation nt Ifs (il)stacl(^s ([ui on lésultcnt puni’ k  ; proL’i’ùs du travail humain.

Leslin passe pour un dissident do l’ortho- doxie (économique. Hien que manifestant une vive admiration pour l’école historique alle- mande, il n’en a pas moins dans sa pratique vii,^oureuscment défendu les saines doctrines (’•conomiques. Libre échanfiiste convaincu, il no croyait pas non plus aux avantages du double étalon monétaire, et il est resté fidèle aux théories fondamentales de la rente et de la population. Sculoment, comme son tempéra- ment et son éducation le poussaient à obser- ver soigneusement le milieu social et politi- que, il ne perdait jamais de vue les causes secondaires qui font parfois dévier les grands courants permanents des forces sociales. En insistant sur l’influence de ces facteurs trop souvent négligés, il semblait parfois réduire à un minimum exagéré la valeur des principes généraux, mais il n’avait garde de les mé- connaître. Les accusations dont il a été l’objet sous ce rapport s’expliquent par son rôle de critique et plus encore par la nature fragmentaire de son œuvre.

C. .1. Ba STABLE.

Bibliographie.

J. C. lsGH\u. Historij of jjoliticn/ Ecnnomy, p. 228-231. — L. L. I’rice Politicnl Economy in Eni/laii’l, p. 123-133.

LITTRÉ  : Emile). —Suivant la méthode po- sitive dont il fut l’un des plus clairvoyants adeptes, Liltré a parcouru le cercle de toutes les connaissances humaines. Sciences exactes, sciences physiques etchimiques, physiologie, philologie, histoire, sociologie, rien n’échap- pa dans l’ordre des études positives à ce puissant esprit. Mais sa grande supériorité vient de ce qu’il sut se garer des travers dan- gereux que donne l’éducation encyclopédique. Ni la sublimité de l’œuvre, ni les tentations offertes par les nombreux et riches maté- riaux amassés, ni la symétrie de l’ensemble, dernière rêverie des philosophes, ne le con- duisirent vers les systèmes.

Sa caractéristique est la prudence scienti- fique. 11 a été une sorte d’essayeur d’idées, de contrôleur génial dont la pierre de touche critique a, pendant de longues années, servi à séparer la vérité de l’erreur, le principe du sophisme.

Malgré sa vaste érudition, il gardait ses préférences pour certaines études qui lui étaient chères. La médecine l’attira plus spé- cialement et aussi la philologie. Nous devons regretter que la sociologie et surtout l’éco- nomie politique n’aient pas été de sa part l’objet de critiques plus nombreuses et plus profondes.


La cause en fut peut-ôtre à Auguste Comte. Littré nous a raconté la déception qu’il éprouva lorsque le maître lut, à la soiiété positiviste de f’aris, les premiers chapitres de sa. l’olitiquc positive, d’-tait après 1848. Les esprits avaient été violemment excités par les déclamations révolutionnaires, par les inventions des utopistes. La politique inco- hérente des gens au pouvoir n’avait pas peu coniribué à poser les problèmes de l’organi- sation des sociétés et de Icurdirection. Comte allait-il sortir de cette anarchie intellec- tuelle et sociale, de ce chaos d’idées et de faits, quelques lumineuses propositions? La politique n’était-elle qu’une littérature où le sentiment, la pitié, l’égoïsme brutal et la violence se mêlaient pour entlammer les passions et pousser àla guerre civile ? L’étude delà société pouvait-elle être une science?

Comte ne répondit pas avec sa Politique positive à ces aspirations des esprits inquiets. Pendant tout le temps que dura la lecture, Littré demeura froid. Aucune lumière ne pointait pour lui à travers ces pages où il ne retrouvait plus la rigueur scientifique de la Philoiiopfiie positive. Quelque souffrance que l’on éprouve à entrer en contradiction avec un maître qui a fait luire à vos yeux la clarté des vérités premières, Littré revint â l’examen de la Politique. Écouter une lecture même en auditeur attentif ne vaut pas l’ana- lyse du cabinet de travail, l’étude dans la- quelle rien n’échappe à la raison. Cette épreuve ne fit que confirmer les appréhensions qu’avait éprouvées Littré. Il reconnut alors les causes de l’obscurité du maître sur la po- litique  : une erreur de méthode. Cette erreur, Littré l’indiqua plus tard dans son livre An- gu!>(e Comte et la Philosophie positive, publié en 1863. Il n’a pas de peine à démontrer que les doctrines de la Politique positive ne sont pas la déduction effective de la Philosophie positive. A cette occasion, Littré reproche à Auguste Comte d’avoir, dans son étude sur la politique, employé la méthode subjective, de s’être servi d’un principe à priori et non d’un principe donné par l’observation ou l’expérience. Et cependant Auguste Comte suit, dès le début, dans sa Politique, la mé- thode déductive. Mais il est bientôt entraîné, comme le dit son éminent critique, hors de la voie positive, et ce livre sur lequel on comptaittant pour l’avancement d’une science dont les enseignements étaient si impatiem- ment attendus, ne se trouve plein que d’idées contradictoires, avec une « tête objective et une queue subjective ou métaphysique ».

C’est à cet égard que Littré peut être classé comme sociologiste. Il a, en effet, ap- porté dans l’examen des doctrines sociales de


LITTRE