Page:Sayous - Jésus-Christ d’après Mahomet.djvu/62

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du Fils par les mêmes arguments qu’elle aurait employés contre des Ariens ordinaires. Les raisonnements de Jean Damascène au commencement du huitième siècle[1], et ceux d’Euthymius à la fin du onzième[2], ne portent pas trace d’une connaissance quelconque de la confusion faite par Mahomet : il est donc probable qu’ils l’ignoraient, et que les Musulmans de leur temps avaient des notions suffisantes de l’Évangile pour redresser tacitement et respectueusement l’erreur de leur maître.

L’autre grande négation dogmatique de Mahomet s’attaque à la Rédemption. Si la précédente avait sa cause dans l’idée que Mahomet se faisait de Dieu, dans sa théologie au sens restreint de ce mot, cette autre négation prend sa source dans l’idée que Mahomet se faisait de l’homme, dans son anthropologie. Termes, il est vrai, trop scientifiques pour cet esprit arabe, puissant dans la contemplation prime-sautière de l’unité divine, mais rebelle à la métaphysique, et indigent en sérieuse observation psychologique. Si la raideur de son déisme l’avait rendu étroit, son étude insuffisante de l’état de l’âme humaine le

  1. Éd. Lequien p. 466—469 petit dialogue entre un chrétien et un sarrasin : Si dixerit creatum esse Verbum et Spiritum, tum quaere : Et quis creavit Verbum Dei et Spiritum ? Quod si necessitate coactus responderit, Deus ipse creavit ; tum tu rursus : Ergo antequam Deus creavit Spiritum et Verbum, non habuit Spiritum neque Verbum. Quod cum audierit, fugiet a te, non habens quod respondeat.
  2. Moamethica, ch. IV : Quia vos Jesum Christum Verbum Dei et Spiritum ejus dicitis : nolentes volentes fatemini Verbum Dei et Spiritum ipsius in ipso Deo esse. Verbum enim Dei, et Spiritus Dei ab eo nequeunt separari cujus sunt, quin expers Verbi expersque Spiritus relinquatur. Si igitur in Deo est verbum ejus, nimirum et ipsum Deus est. Itaque et Christus, Verbum Dei, Deus est. Quia vero ex virgine natus est, etiam homo est. Sic igitur duabus naturis constantem eum, oportet confiteri et Deum et hominem.