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HISTOIRE

Malgré l’émotion inséparable d’un début, les miens furent brillants. Tout Paris voulut me voir. Mon répertoire varia à l’infini ; pendant trois ans je battis aux champs, successivement pour l’école Polytechnique, pour Louis-Philippe, pour Lafayette, pour Laffite, pour dix-neuf ministres, pour la Pologne et toujours pour Napoléon… le Grand.

J’appris, écrivez ma chère Pie, c’est de l’histoire, j’appris à tirer le pistolet.

Dès le second coup, j’étais aguerri.

— Je le crois bien, pensais-je, il était devenu sourd dès le premier.

— J’en tirai par la suite beaucoup plus que n’en ont tiré quelques hommes de guerre, gardes nationaux célèbres, dont l’histoire fera très-bien d’oublier les noms.

Pendant longtemps, par un bonheur incroyable, il ne m’arriva pas une seule fois de prendre un nom pour un autre et de m’abuser sur la valeur de ceux dont j’avais à constater la popularité ; et pourtant les tentatives de séduction ne me manquèrent pas : plus d’une fois des spectateurs, qui pouvaient bien être des conspirateurs ou des agents de police déguisés en Homme, me sollicitèrent de brûler de la poudre en l’honneur de Polignac, de Wellington, de Nicolas, et de beaucoup d’autres. Je sortis vainqueur de tous les pièges qui me furent tendus.