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COUR CRIMINELLE

« Le président : « Je recommande à l’auditoire le plus profond silence, le plus complet recueillement. Bouledogues, introduisez l’accusé. »

« Le Loup est ramené dans la salle ; sa démarche est assurée. Il entend la lecture de la déclaration du jury sans émotion apparente.

« Le Vautour général requiert, d’une voix émue, l’application de la peine.

« La Cour condamne le Loup a la peine de mort.

« La foule immense qui s’est entassée dans le prétoire reste morne et silencieuse ; pas un mot, pas un bêlement, pas un geste ne se manifeste. On dirait, à voir tous ces regards fixés sur un même point, tous ces becs muets et silencieux, qu’une même commotion électrique les a frappés tous d’une éternelle immobilité. »

Cette phrase ronflante termine le récit de cette dernière séance, publié dans le journal de la Cour criminelle. Le héros du procès vient d’être pendu ; il est mort avec courage et en protestant de son innocence.

Les geôliers ont trafiqué avantageusement des objets mobiliers qui avaient appartenu au condamné. Un Bœuf anglais, venu tout exprès des pâturages du Middlesex, a payé deux livres sterling une mèche de cheveux ; un libraire offre six mille francs du Triomphe de la Vertu.

On a publié quarante-deux portraits du Loup ; et, quoiqu’ils n’aient aucun rapport entre eux, chacun se déclare