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D’UN MOINEAU DE PARIS.

de proie vinrent se poser dessus, il y en eut de pris et de dévorés.

Émerveillé de cette liberté absolue qui existe sans aucun danger, je me mis à rechercher les causes de cette admirable égalité. L’égalité des droits vient évidemment de l’égalité des moyens. Les Loups sont tous égaux, parce qu’ils sont tous également forts, comme me l’avait fait pressentir mon interlocuteur. Le mode à suivre, pour arriver à l’égalité absolue de tous les citoyens, est de leur donner à tous, par l’éducation, comme font les Loups, les mêmes facultés. Dans les violents exercices auxquels s’adonnent ces républicains, tout être chétif succombe : il faut que le Louveteau sache souffrir et combattre, ils ont donc tous le même courage. On ne s’ennoblit point dans une position supérieure à celle d’autrui, on s’y dégrade dans la mollesse et le rien-faire, Les Loups n’ont rien et ont tout. Mais cet admirable résultat vient des mœurs. Quelle entreprise, que de réformer les mœurs d’un pays gâté par les jouissances ! Je devinai pourquoi et comment il y avait à Paris des Moineaux qui mangeaient des vers, des graines, qui habitaient des oasis, et comment il y avait de pauvres Moineaux forcés de picorer par les rues. Par quels moyens convaincre les Moineaux heureux de se faire les égaux des Moineaux malheureux ? Quel nouveau fanatisme inventer ?

Les Loups s’obéissent tout aussi durement à eux-même que les Abeilles obéissaient à leur reines, et les Fourmis à