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LE PREMIER FEUILLETON

ciens étaient les plus lourdauds personnages qui se puissent voir : des Mulets étiques, des Baudets sur le retour, des Oies sauvages, des Dindons gloussant tous les hurlements de la forêt, de l’écurie et de la basse-cour.

On m’a dit que c’était l’usage de mettre à l’orchestre des théâtres dramatiques le rebut des voix et des instruments. Plus le drame est beau, plus l’orchestre est triste à entendre. Le suprême bon ton des dramaturges de génie, c’est de supprimer tout à fait les musiciens, et alors ces messieurs s’en vont tout joyeux en bénissant Hernani, Charles VII, Caligula et leur bonne étoile ; mais, Dieu merci ! ce congé ne leur est pas accordé tous les jours.

La symphonie commença. Cela doit ressembler beaucoup à ces symphonies fantastiques dont vous parlez avec enthousiasme tous les hivers. Quand chacun eut gloussé sa petite partie tout en sommeillant, la toile se leva, et alors commença pour moi, pauvre feuilletonniste novice, un drame étrange et solennel.

Figurez-vous, mon maître, que les paroles de ce drame avaient été composées tout exprès pour la circonstance, par un grand Lévrier à poil frisé, moitié Lévrier et moitié Bouledogue, moitié anglais et moitié allemand, qui a la prétention d’entrer à l’institut des Chiens français avant huit jours.

Ce grand poëte dramatique, qui a nom Fanor, compose ses drames d’une façon qui m’a paru très-simple et très-commode. Il s’en va d’abord chez le Carlin de M. Scribe