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D’UNE VIEILLE CORNEILLE.

— Quelles nouvelles, lui dis-je, quelles nouvelles, mon bon Jacques ?

— Affreuses ! me répondit le vieux serviteur d’un ton si lugubre, que je vis bien que je devais me préparer à tout entendre.

— Affreuses ! reprit-il. Ils sont tous morts !

— Tous ? m’écriai-je. Parlez donc, Jacques ! et parlez vite ! Vous me mettez au supplice.

— Tous, dit-il, et de mort violente ; et il n’en reste pas pierre sur pierre.

— Expliquez-vous, lui dis-je, et rassemblez vos souvenirs. De quoi ne reste-t-il pas pierre sur pierre ? et enfin qui est mort ?

— Monseigneur pouvait fuir encore, continua le pauvre Jacques en suivant ses idées ; mais il a préféré résister jusqu’à la fin, et s’ensevelir sous les ruines de notre château.

Bref, voici ce que Jacques me raconta : — À la suite d’une affaire de bourse, très-heureuse pour lui, la fortune du propriétaire du vieux château, et du château neuf, s’étant accrue considérablement, sa considération s’était accrue d’autant, et il fut nommé… baron ! Le vaniteux banquier crut qu’il serait indigne de sa nouvelle position de garder dans ses domaines un château délabré, et, en peu de jours, quoique l’hiver approchait, l’œuvre de destruction fut accomplie. Mes ruines chéries disparurent à jamais.