Page:Scènes de la vie privée et publique des animaux, tome 1.djvu/570

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
364
VOYAGE D’UN LION D’AFRIQUE

Sa Majesté Lionne eut alors un retour de jeunesse, et chanta la Marseillaise des Lions :

Aiguisez vos griffes, hérissez vos crinières !

— Mon père, dit le jeune prince, si vous êtes disposé à céder au vœu national, je vous avouerai que les Lions de toutes les parties de l’Afrique, indignés du far niente de Votre Majesté, étaient sur le point d’exciter des orages capables de faire sombrer le vaisseau de l’État.

— Ah ! mon drôle, pensa le vieux Lion, tu es attaqué de la maladie des princes royaux, et ne demanderais pas mieux que de voir mon abdication !… Bon, nous allons te rendre sage ! Prince, reprit à haute voix le Cosmopolite, on ne règne plus par la gloire, mais par l’adresse, et pour vous en convaincre, je veux vous mettre à l’ouvrage.

Dès que cette nouvelle circula dans toute l’Afrique, elle y produisit un tapage inouï. Jamais, dans le désert, aucun Lion n’avait abdiqué. Quelques-uns avaient été dépossédés par des usurpateurs, mais personne ne s’était avisé de quitter le trône. Aussi la cérémonie pouvait-elle être facilement entachée de nullité, faute de précédents.

Le matin, à l’aurore, le Grand-Chien, commandant les hallebardiers, dans son grand costume et armé de toutes pièces, rangea la garde en bataille. Le vieux roi se mit sur son trône. Au-dessus, on voyait ses armes représentant