Page:Schœlcher - Le procès de Marie-Galante, 1851.djvu/13

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un colon de la Martinique, dont ses compatriotes firent aussi un chef de conjuration méditant le massacre de ses frères, parce qu’il avait voulu avancer d’un pas, M. Th. Lechevalier, qui depuis a fait assez connaître s’il était l’ennemi des colons, s’exprimait ainsi :

« En 1823, à l’occasion d’une brochure qui circula dans le pays, les blancs virent l’orage grondant sur leurs priviléges, et, au lieu d’avoir recours à la conciliation, dans une lutte qui devait tourner à leur désavantage, par la position nouvelle où était la métropole, ils eurent recours à leurs vieilles armes, la vengeance, l’injustice et la calomnie…

« On prétexta un complot ; on fit croire facilement aux créoles, disposés à saisir toutes les occasions de satisfaire leur haine contre les mulâtres, que ceux-ci avaient résolu de massacrer la population blanche ; que la police coloniale tenait le fil d’une trame sourdement ourdie par eux. Cette malheureuse classe d’hommes eut alors son temps de terreur. »

Plus loin, nous lisons encore, à propos de 1831 :

« La classe blanche ne voyait partout que ses privilèges à ressaisir ; elle autorisa le désordre ; elle l’encouragea, pour l’attribuer ensuite à l’incompatibilité de l’ordre dans les colonies, avec l’égalité accordée aux gens de couleur. On vit de l’indécision chez M. le gouverneur, et l’on crut que l’ordonnance n’était pas tellement définitive, qu’on ne pût la faire rapporter ; tous les moyens étaient bons pour cela, etc.[1] »

À la suite de cette agitation, M. Th. Lechevalier expose que cent soixante-quinze individus furent impliqués dans un complot dont le but était, alors comme aujourd’hui, de porter le pillage, la dévastation et le massacre dans la colonie. Vingt-six accusés furent envoyés à l’échafaud. Seize de ces malheureux étaient simplement déclarés coupables de résistance à la force publique, dans un conflit où pas un blanc n’avait été blessé, pas un !

Le procès de la Grand’-Anse (Martinique) présente les mêmes caractères, comme on le peut voir dans les feuilles

  1. La vérité sur les événements dont la Martinique a été le théâtre en 1831. (Page 7 et 21.)