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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

chez eux une occupation en faveur ; on peut se faire une idée de la lenteur de leur manière d’écrire, par ce fait que le Lama qui a copié le document relatif à Himis (voyez chap. XIII) a employé six heures à ce travail. Les voyageurs ont souvent déploré l’ignorance des Lamas ; on a demandé à beaucoup d’entre eux une explication de la prière à six syllabes, Om mani padme houm, dont l’influence magique sur la prospérité des hommes est traitée dans tant de livres religieux, et ce ne fut qu’après des questions répétées qu’on put enfin obtenir une réponse satisfaisante. Schmidt fut très surpris des réponses des bouddhistes népalais à Hodgson. « Un Lama tibétain ou mongol, disait-il, n’aurait pas si bien répondu à cette question. » Csoma et Huc ont remarqué que les Lamas sont peu versés dans leur littérature sacrée ; Huc dit qu’ils excusent leur ignorance en arguant de la profondeur de leur religion, et plus loin : « Un Lama qui sait le tibétain et le mongol est un sage, un savant ; s’il a aussi une légère teinte de littérature chinoise et mandchoue, on le considère comme un phénomène[1] ». Mes frères furent souvent embarrassés par les réponses confuses faites par les Lamas à des questions sur les phénomènes naturels, ou sur leur religion, ou leur histoire. Les Lamas préféraient toujours causer de théologie mystique, et il était relativement facile d’obtenir d’eux des explications sur les propriétés magiques de certains charmes.

RÉGIME

Les Lamas suivent le régime en usage dans le pays[2]. Ils peuvent manger tout ce qui leur est offert comme aumône, mais il ne leur est pas permis de boire des liqueurs enivrantes ; on en prend cependant, sous le prétexte que ce sont des « médecines »[3].

La nourriture animale n’est pas défendue (d’après les légendes singalaises,

  1. Mémoire de l’Académie de Saint-Pétersbourg, vol. I, p. 93 ; Csoma, Journal As., Soc. Beng., vol. VII, p. 14 ; Huc, Souvenirs, vol. I, p. 55 et 209. Comparez aussi Turner, Embassy, p. 316.
  2. Sur la nourriture des Tibétains en général, voyez Turner, Embassy, pages 24 à 243 ; Pemberton, Report, p. 156. Moorcroft, Travels, vol. I, pp. 182 à 332 ; vol. II, p. 77 ; Mansasaur, As. Res., vol. XII, page 394 à 486 ; Huc, Souvenirs, vol. II, p. 258 ; Cunningham, Ladak, p. 305.
  3. Wassiljew, Der Buddhismus, p. 94 ; Moorcroft, Travels, vol. II, p. 12, raconte qu’il a vu, à Lama-Yourou, les Lamas boire leur liqueur nationale Chong pendant leur service religieux. Les Lamas de Sikkim prennent aussi en grande quantité la boisson fermentée des Lepchas faite avec du millet.