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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

La position des doigts (en tibétain Chakdja, littéralement un emblème, un sceau, en sanscrit Moudra) a aussi un sens allégorique. Ainsi la main droite posée sur les genoux, la paume de la main en dehors, symbolise la charité et on l’appelle Chagyo chin, « la bonne main de charité. »

L’attitude Rangi nying gar thalmo charva, c’est-à-dire, « unir les paumes des mains sur son cœur », est celle-ci : Les deux mains sont élevées, un doigt de la main droite touche un ou deux doigts de la main gauche, comme le fait une personne habituée à employer ses doigts à expliquer son intention. Cette attitude figure « l’unité de la sagesse avec la matière », en tibétain, Thabshes ou Thabdang shosrab, ou la prise de formes matérielles par les Bouddhas et Bōdhisattvas dans le but de répandre la droite intelligence parmi les êtres animés. Ce n’est certainement pas par hasard qu’aucun des gestes des bouddhistes ne ressemble à ceux des brahmes, quand ils accomplissent les cérémonies de leur culte[1].

Les Bouddhas sont des hommes, mais des hommes de forme très parfaite ; ils sont doués de trente-deux beautés supérieures et de quatre-vingts ou quatre-vingt-quatre secondaires[2]. C’est en conformité stricte avec ces qualités caractéristiques qu’ils sont représentés avec des traits doux et souriants ; on donne aussi la même expression à Maitreya, le Bouddha futur, qui dans tous ses autres attributs est l’égal des Bouddhas passés. Ceux-ci, les Manouschi Bouddhas, ont le teint doré ou jaune ; ces deux couleurs sont identiques, la dernière n’est qu’une substitution moins chère que l’or. Les oreilles sont grandes, les bouts reposent sur les épaules ; les bras sont longs ; ils n’ont qu’un seul cheveu sur le front, en sanscrit Ournâ ; sur le sommet de la tête est une élévation cylindrique, en sanscrit Ousnisha, en tibétain Tsougtor, et de celle-ci s’élève un ornement conique appelé en tibétain Progzhou ou Chodpan, « ornement de tête, couronne, diadème », qui est presque toujours doré. Les bouddhistes considèrent l’Ousnisha comme une excroissance du crâne, interprétation que n’appuie pas l’étymologie du mot, qui borne son sens à « un turban » ou « parure de cheveux ». Je crois que cette curieuse

  1. Cette remarque est tirée de l’ouvrage in-folio de M.  S. C. Belno, The Sunday or dayly prayers of the Brahmans, Londres, 1851. Pour les gestes bouddhiques, voyez les planches d’Hoffmann, Buddha Pantheon.
  2. Voyez Burnouf, le Lotus, appendice viii. Hardy, Manual, p. 367.