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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

nourriture animale est défendue. Après ce maigre repas, les prières et les lectures continuent jusqu’à la nuit ; de temps en temps on passe du thé à la ronde. Avant que les assistants n’aillent reposer, le Supérieur Lama spécifie les divers devoirs de l’assemblée pour le lendemain, et ordonne, comme pénitence, de dormir selon la « manière du lion », Sengei nyal tab[1], c’est-à-dire de se coucher du côté droit, la jambe étendue et la tête soutenue par la main droite.

Le second jour est le plus important ; on le nomme Ngoïshi, « la substance, la réalité ». Tout le jour se passe dans une rigoureuse abstinence de nourriture et de boisson. — On ne doit pas même avaler sa salive ; chacun a devant soi un vase dont il se sert comme de crachoir. Les personnes délicates qui ne pourraient supporter longtemps cette pénible prescription, peuvent parfois se rafraîchir de quelques gouttes d’eau et prendre l’air quelques instants. Il est défendu de prononcer un mot, et si quelqu’un s’oubliait à en proférer un seul, il serait puni par l’obligation de chanter quelques hymnes à pleine voix. On doit prier en silence et se repentir des actions coupables. L’abstinence de nourriture et de boisson se prolonge jusqu’au lendemain au lever du soleil. Alors le Supérieur Lama demande si quelques fidèles sont disposés à continuer de même jusqu’au matin suivant, ce qui est tenu pour un moyen très efficace de se purifier de tous les péchés ; il est extrêmement rare que quelqu’un se sente la force de persister. Le Lama donne donc la permission de rompre le jeûne ; sur quoi les assistants se lèvent, sortent du temple et prennent un repas substantiel que la foule pieuse leur a préparé au dehors.

RITES POUR OBTENIR DES POUVOIRS SURNATURELS

La confiance dans l’influence puissante des prières et des cérémonies est si répandue dans toutes les tribus bouddhistes de la haute Asie que toute entreprise est précédée par des prières, des incantations et la célébration de certaines cérémonies pour apaiser la colère des démons. Le peuple croit aussi que, grâce à la stricte observation des devoirs inhérents à ces rites, il pourra

  1. Seng-ge, « le lion ; » nyal « dormir » ; stabs, « mode ». On croit que c’est dans cette attitude que Sâkyamouni est entré à Nirvana.