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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

Ces chiffres ont tous une couleur constante pour chacun d’eux, mais qui peut être la même pour plusieurs des neuf chiffres ; 1 est blanc : 9, rouge ; 8, blanc ; 7, rouge ; 6, blanc : 5, jaune ; 4, vert ; 3, bleu ; 2. noir. Ces chiffres ainsi colorés sont appelés les « neuf taches », en tibétain Mebagou, en mongol Mangga[1]. La succession des Mébas a une grande importance à plusieurs égards ; elle sert principalement à indiquer les années particulièrement dangereuses pour l’existence, et qui, selon les croyances tibétaines, se représentent tous les dix ans ; ce sont, disent-ils, les années où « la naissance-Méba doit se consolider ». La naissance Méba est le chiffre de la cinquième ligne (la seconde des séries reproduites ici), qui, par hasard, se trouve juste au-dessous de l’animal dans le signe duquel le consultant est né. Dans l’arrangement que nous avons décrit cette Méba reparaît tous les dix ans ; elle est aussi le centre de neuf compartiments dont les chiffres sont exactement conformes à ceux d’un groupe distant de dix ans, vingt ans, etc. Les dangers présagés par la coïncidence de ces années critiques avec les « consolidations de la naissance-Méba », peuvent être détournés par la cérémonie Ruibal Chenpoï dokjed, « détourner (les maux) au nom de la grande Tortue[2] », que les riches font célébrer, à leur profit, par les lamas, quand ces années se présentent.

Dans la septième ligne étaient écrites sept sentences, mais elles étaient déjà presque entièrement effacées quand mon frère Hermann se procura cet original.

Dans la huitième ligne sont reproduites les têtes des soixante animaux, par deux dans chaque compartiment pour indiquer les phases de la lune.

Une autre table, destinée au même usage, qu’Adolphe s’est procurée à Gnary Khorsoum, a la forme d’un carré ; au centre, autour d’une tortue, les douze animaux cycliques sont groupés par trois fois ; dans la première série chacun d’eux figure une fois ; ils sont répétés cinq fois dans les deux autres groupes pour former le nombre soixante. Nous remarquerons, comme une curieuse dérogation à la liste d’animaux ci-dessus indiquée, que nous y trouvons un éléphant à la place du bœuf. Entre les deux espa-

  1. ṣMeba, « une tache, une pustule » ; « ḍgu, « neuf ». Comp. Pallas, Mongol. Völker, vol. II, p. 229.
  2. Rus-ṣbal, « tortue » ; chenpo’i, « de la grande » ; ḅzlog, « retourner » ; byed, « faire ». On trouvera des détails sur les croyances tibétaines au sujet de la grande Tortue, no II, 1.