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LA LECTURE ET LES LIVRES


L’ignorance ne dégrade l’homme que lorsqu’on la trouve accompagnée de la richesse. Le pauvre est accablé sous sa détresse ; son travail prend la place du savoir et occupe ses pensées. Par contre, les riches qui sont ignorants vivent uniquement pour leurs plaisirs et ressemblent aux bêtes : on constate cela chaque jour. Il faut en outre leur reprocher de ne pas employer leur richesse et leur loisir à ce qui donne à ceux-ci leur plus grande valeur.

Quand nous lisons, un autre pense pour nous ; nous répétons simplement son processus mental. C’est de la même manière que l’enfant qui apprend à écrire suit avec la plume les traits indiqués au crayon par le maître. Donc, quand nous lisons, le travail de la pensée nous est épargné pour la plus grande partie. De là notre soulagement sensible, quand, après avoir été occupés par nos propres pensées, nous passons à la lecture. Mais, pendant que nous lisons, notre tête n’est à vrai dire que le champ clos de pensées étrangères. Il advient de là que celui qui lit beaucoup et presque toute la journée, mais qui se livre, dans l’intervalle, à