Page:Schopenhauer - Aphorismes sur la sagesse dans la vie, 1880, trad. Cantacuzène.djvu/230

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quence ; on doit se rappeler que toute souffrance, toute incommodité, tout désordre dans une partie quelconque du corps, affecte l’esprit. Pour bien se pénétrer de cette vérité, il faut lire Cabanis : Des rapports du physique et du moral de l’homme.

C’est pour avoir négligé de suivre ce conseil que bien des grands esprits et bien des grands savants sont tombés, sur leurs vieux jours, dans l’imbécillité, dans l’enfance et jusque dans la folie. Si, par exemple, de célèbres poètes anglais de notre siècle, tels que Walter Scott, Wordsworth, Southey et plusieurs autres, arrivés à la vieillesse et même dès leur soixantaine sont devenus intellectuellement obtus et incapables, même imbéciles, il faut sans doute l’attribuer à ce que, séduits par des honoraires élevés, ils ont tous exercé la littérature comme un métier, en écrivant pour de l’argent. Ce métier entraîne à une fatigue contre nature : quiconque attelle son Pégase au joug et pousse sa Muse du fouet aura à l’expier de la même manière que celui qui a rendu à Vénus un culte forcé. Je soupçonne que Kant lui-même, dans un âge avancé, devenu déjà célèbre, s’est livré à un travail excessif et a provoqué par là cette seconde enfance dans laquelle il a vécu ses quatre dernières années.

Chaque mois de l’année a une influence spéciale et directe, c’est-à-dire indépendante des conditions météorologiques, sur notre santé, sur l’état général de notre corps, et même sur l’état de notre esprit.