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CHAPITRE II

DE CE QUE L’ON EST


Nous avons déjà reconnu d’une manière générale que ce que l’on est contribue plus au bonheur que ce que l’on a ou ce que l’on représente. Le principal est toujours ce qu’un homme est, par conséquent ce qu’il possède en lui-même ; car son individualité l’accompagne en tout temps et en tout lieu et teinte de sa nuance tous les événements de sa vie. En toute chose et à toute occasion, ce qui l’affecte tout d’abord, c’est lui-même. Ceci est vrai déjà pour les jouissances matérielles, et, à plus forte raison, pour celles de l’âme. Aussi l’expression anglaise : To enjoy one’s self, est-elle très bien trouvée ; on ne dit pas en anglais : « Paris lui plaît, » on dit : « Il se plaît à Paris (He enjoys himself at Paris). »


I. — La santé de l’esprit et du corps.


Mais, si l’individualité est de mauvaise qualité, toutes les jouissances seront comme un vin exquis dans une