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LA SECONDE CLASSE D’OBJETS POUR LE SUJET

Mais ces messieurs savent-ils bien quelle est l’heure qui sonne en ce moment ? — Une époque dès longtemps prédite est arrivée : l’Église chancelle ; elle chancelle si fort, que l’on se demande si elle pourra retrouver son centre de gravité car la foi a disparu. Pour la lumière de la révélation, comme pour toute autre lumière, quelque obscurité est une condition indispensable. Le nombre a grossi considérablement de ceux qu’un certain niveau et un certain horizon de connaissances rendent incapables de croire. Ceci montre l’extension générale, prise par le vulgaire rationalisme, étalant de plus en plus sa large face de bouledogue. Ces profonds mystères du christianisme, sur lesquels on a médité et disputé pendant des siècles, il se dispose tout tranquillement à les mesurer à son aune de boutiquier et croit par la faire des merveilles de sagesse. C’est surtout l’enseignement essentiel du christianisme, le dogme du péché originel, qui est devenu pour les têtes carrées du rationalisme un sujet de risée ; n’est-il pas évident, disent-ils, que l’existence de chaque homme commençant à sa naissance, il est impossible qu’il vienne au monde, déjà entaché de péché ? Comme c’est intelligent ! — Et de même que, lorsque la misère et l’abandon prennent le dessus, les loups commencent à se montrer dans le village, de même en ces circonstances, le matérialisme, toujours aux aguets, relève la tête et s’avance assisté de son compagnon le « bestialisme » (que certaines gens appellent humanisme). — Plus les hommes deviennent incapables de croire, plus le besoin d’acquérir des connaissances grandit. À l’échelle du développement