Page:Schopenhauer - Le Fondement de la morale, traduction Burdeau, 1879.djvu/13

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CHAPITRE PREMIER.

INTRODUCTION.

§ 1. — Le Problème.

La Société Royale Hollandaise de Haarlem, en 1810, mit au concours la question suivante, qui fut résolue par J. C. F. Meister : « Pourquoi les philosophes ont-ils entre eux de tels différends au sujet des principes de la morale, tandis que dans les conséquences, quand il s’agit de déduire de leurs principes nos devoirs, ils sont d’accord ? » Cette question n’était qu’un jeu, en comparaison de notre tâche à nous. En effet :

1o  Dans le problème que nous propose aujourd’hui la Société Royale, il ne s’agit pas de moins que du véritable fondement objectif de la morale, et par suite aussi de la moralité. C’est par une Académie qu’il nous est proposé : une Académie ne peut pas nous demander de poursuivre un but pratique, de composer une exhortation à l’honnêteté et à la vertu, toute appuyée sur quelques-uns de ces principes, dont on met en lumière les côtés spéciaux et dont on voile les côtés faibles : ces façons-là sont bonnes pour les traités populaires. Une Académie, elle, ignore les intérêts pratiques, et ne connaît que ceux de la science : ce qu’il lui faut, c’est un exposé tout philosophique, c’est-à-dire indépendant de toute loi