Page:Schwob - La Lampe de Psyché, 1906.djvu/244

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parler et lui annonça son égorgement, et le conte du miroir d’Ilsée, d’où sortit une autre Ilsée qui tua Ilsée, et l’aventure du miroir nocturne de la ville de Milet qui faisait s’étrangler les Milésiennes à la nuit levante. Elle avait vu la peinture mystérieuse où le fiancé a étendu un glaive devant sa fiancée, parce qu’ils se sont rencontrés eux-mêmes dans la brume du soir : car les doubles menacent la mort. Mais elle ne craignait pas son image, puisque jamais elle ne s’était rencontrée, sinon candide et voilée, non cruelle et voluptueuse, elle-même pour elle-même. Et les lames polies d’or vert, les lourdes nappes de vif-argent ne montraient point Morgane à Morgane.

Les prêtres de son pays étaient géomanciens et adorateurs du feu. Ils disposèrent le sable dans la boîte carrée, et y tracèrent les lignes ; ils calculèrent au moyen de leurs talismans de parchemin, ils firent le miroir noir avec de l’eau mélangée de fumée. Et le soir Morgane se rendit vers eux, et elle jeta dans le feu trois gâteaux d’offrande. « Voici, » dit le géomancien ; et il montra le miroir noir liquide. Morgane regarda :