Page:Schwob - Vies imaginaires, 1896.djvu/45

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mis. L’autel triangulaire était aussi taillé dans une pierre noire. D’autres tables, faites de dalles noires, étaient percées de trous réguliers pour laisser couler le sang des victimes. Aux parois pendaient de larges lames d’acier, emmanchées d’or, qui servaient à ouvrir les gorges, et le parquet poli était jonché de bandelettes sanglantes. La grande pierre sombre avait deux mamelles dures et pointues. Telle était l’Artemis d’Éphèse. Sa divinité se perdait dans la nuit des tombes égyptiennes, et il fallait l’adorer selon les rites persans. Elle possédait un trésor enfermé dans une espèce de ruche peinte en vert, dont la porte pyramidale était hérissée de clous d’airain. Là, parmi les anneaux, les grandes monnaies et les rubis, gisait le manuscrit d’Héraclite, qui avait proclamé le règne du feu. Le philosophe l’y avait déposé lui-même à la base de la pyramide, tandis qu’on la construisait.