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IVANHOÉ

fief d’Ivanhoé, dit de Bracy, qui, s’étant comporté honorablement pendant ce tournoi, avait déposé son écu et son heaume pour reprendre sa place à la suite du prince.

— Oui, répondit Waldemar Fitzurze, ce beau cavalier est capable de réclamer le château et le domaine que Richard lui a assignés, et que la générosité de Votre Altesse a depuis donnés à Front-de-Bœuf.

— Front-de-Bœuf, répliqua Jean, est plutôt homme à avaler trois manoirs comme celui d’Ivanhoé que d’en dégorger un seul. Du reste, messieurs, j’espère que personne ici présent ne me disputera mon droit de conférer les fiefs de la Couronne aux fidèles serviteurs qui m’entourent, et qui sont prêts à faire le service militaire d’usage, à la place de ceux qui vont errants dans les pays étrangers et qui ne peuvent rendre ni hommage ni service quand ils en sont requis.

L’auditoire était trop intéressé dans cette question pour ne pas déclarer que le droit que le prince s’arrogeait était tout à fait incontestable.

— Prince généreux, s’écrièrent-ils, très noble seigneur, qui s’impose ainsi la tâche de récompenser ses fidèles serviteurs !

Telles furent les paroles que l’escorte proféra ; car tous attendaient pareilles gratifications aux dépens des serviteurs et des favoris du roi Richard, si toutefois ils ne les avaient pas déjà reçues,

Le prieur Aymer appuya aussi l’opinion générale, en faisant observer cependant que Jérusalem la sainte ne pouvait, à la vérité, être citée comme un pays étranger. Elle était communis mater, la mère commune de tous les chrétiens ; mais il ne voyait pas, déclarait-il, comment le chevalier d’Ivanhoé pouvait tirer parti de cet argument, puisque lui, le prieur, était assuré que les croisés, sous Richard, ne s’étaient jamais avancés plus loin qu’Ascalon, qui, comme tout le monde le savait, était une ville de Philistins, et ne pouvait jouir d’aucun des priviléges de la ville sainte.