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IVANHOÉ.

soir, et voilà pourquoi il se hâte de partir, dit de Bracy.

— Pas du tout, messire chevalier, répliqua l’abbé ; mais il faut que je m’avance de quelques milles ce soir vers ma demeure.

— Il se sépare de nous, dit le prince bas à Fitzurze ; sa crainte anticipe sur l’événement, et ce poltron de prieur me quitte le premier.

— Ne craignez rien, monseigneur, dit Waldemar, je vais faire valoir à ses yeux des raisons qui l’engageront à se joindre à nous quand nous nous assemblerons à York.

— Messire prieur, dit-il, il faut que je vous parle en particulier avant que vous remontiez à cheval.

Les autres convives se dispersèrent alors rapidement, à l’exception de ceux qui étaient immédiatement attachés à la faction du prince Jean et de sa suite.

— Voilà donc le résultat de votre avis, dit le prince lançant un regard de colère sur Fitzurze ; je me vois bravé à ma propre table par un manant saxon ivre, et, au seul nom de mon frère, mes prétendus amis me délaissent comme si j’avais la lèpre.

— Patience, sire, répliqua son conseiller ; je pourrais vous retourner votre accusation et blâmer votre légèreté intempestive, qui a fait manquer mon projet et qui a trompé le bon jugement qui vous est propre. Mais ce n’est pas le temps de récriminer ; de Bracy et moi, nous allons à l’instant trouver ces lâches inconstants, et nous les convaincrons qu’ils se sont trop avancés pour reculer.

— Ce sera inutile, dit le prince Jean en arpentant la salle d’un pas désordonné et s’exprimant avec une agitation à laquelle le vin qu’il avait bu contribuait largement ; ce sera en vain : ils ont vu l’écriture sur la muraille, ils ont aperçu la patte du lion sur le sable, ils ont entendu son rugissement ébranler la forêt, rien ne saura ranimer leur courage.

— Plût au Ciel, dit à demi-voix Fitzurze à de Bracy, que quelque chose pût ranimer le sien ! Le seul nom de son