Page:Scott - Ivanhoé, trad. Dumas, 1874.djvu/528

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— Que les saints nous préservent, répondit le prieur, de voir le fils du saxon Cédric quitter notre couvent avant que ses blessures soient parfaitement cicatrisées ! Ce serait la honte de notre monastère, si je le permettais.

— Et, de mon côté, je n’aurais aucun désir de quitter votre toit hospitalier, mon vénérable père, ajouta Ivanhoé, si je ne me sentais en état de supporter les fatigues du voyage, et si je n’étais forcé de me mettre en route sur-le-champ.

— Et qui peut nécessiter un départ aussi prompt ? demanda le prieur.

— N’avez-vous jamais, révérend père, répondit le chevalier, senti comme une appréhension d’un malheur prochain et dont vous cherchiez vainement à vous expliquer la cause ? Votre esprit, comme un paysage que le soleil éclaire, ne s’est-il jamais voilé tout à coup d’obscurs nuages, précurseurs d’une tempête prochaine ? Et ne pensez-vous pas que ces pressentiments de l’âme méritent notre attention comme des avis qui proviennent de nos anges tutélaires ?

— Je ne puis nier, répondit le prieur, que de pareilles choses ne soient arrivées et qu’elles ne viennent du Ciel ; mais, en ce cas, ces inspirations avaient un but utile et évident. Mais, toi, blessé comme tu l’es, à quoi te servirait de suivre les pas de celui que tu ne pourrais secourir, dans le cas où il serait attaqué ?

— Prieur, dit Ivanhoé, tu te trompes ; je suis assez fort pour échanger un coup de lance avec quiconque me défierait à un tel jeu. Mais, quand il en serait autrement, ne saurais-je pas lui venir en aide dans son danger par d’autres moyens que la force des armes ? Il n’est que trop certain que les Saxons n’aiment pas la race normande ; et qui sait ce qui peut arriver s’il se présente parmi eux quand leurs cœurs sont irrités par la mort d’Athelsthane, et leurs têtes échauffées par les excès auxquels ils vont s’abandonner ? Je regarde son arrivée au milieu d’eux, dans un tel moment, comme très dangereuse, et je suis résolu à partager