Page:Scott - Ivanhoé, trad. Dumas, 1874.djvu/552

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troubler l’harmonie, d’autant plus qu’il voyait le front d’Ivanhoé assombri par l’inquiétude.

— Nous sommes honorés, dit-il à Ivanhoé à voix basse, par la présence de notre courageux souverain ; cependant je serais fâché de le voir perdre ici un temps que les affaires de son royaume peuvent rendre précieux.

— C’est parler avec prudence et sagesse, brave Robin Hood, répondit Wilfrid. Vous devez savoir, d’ailleurs, que plaisanter avec un roi, même dans ses moments d’abandon, c’est jouer avec un lion qui, à la moindre provocation, se sert de ses dents et de ses griffes.

— Vous avez touché la vraie cause de ma crainte, ajouta l’outlaw. Mes hommes sont grossiers par nature et par habitude, le roi est aussi impétueux qu’enjoué ; qui sait si bientôt un motif d’irritation ne surviendra pas ? Il est temps d’interrompre ce repas.

— Tâchez alors de trouver quelque moyen, brave yeoman, dit Ivanhoé ; car chaque insinuation que j’ai hasardée à ce sujet semble l’avoir décidé à prolonger la séance.

— Dois-je si vite abuser du pardon et de la faveur de mon souverain ? dit Robin Hood en réfléchissant un moment. Oui, par saint Christophe ! il le faut. Je ne serais pas digne de sa faveur si je ne risquais pas de la perdre pour tâcher de lui rendre service. Holà ! Scathlock, va te cacher derrière ce taillis et entonne-moi une fanfare normande sur ton cor de chasse, et fais cela sans perdre un instant.

Scathlock obéit à son capitaine, et, au bout de cinq minutes, le son du cor fit tressaillir les convives.

— C’est le cor de Malvoisin, s’écria le meunier se redressant sur ses pieds et saisissant son arc.

Le frère Tuck lâcha le flacon qu’il tenait en ce moment et saisit son bâton à deux bouts.

Wamba s’arrêta au milieu d’une plaisanterie, et reprit sa targe et son épée.

Tous les autres assistants ramassèrent leurs armes.

Les hommes qui mènent une vie précaire passent faci-