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Le Nain Noir

venir à leurs besoins d’ailleurs très modérés. Davie recevait souvent de la part des étrangers de petites douceurs, qu’il ne demandait point, qu’il ne refusait point, mais pour lesquelles il ne se croyait point obligé de montrer de la reconnaissance. Effectivement, il se considérait avec raison comme un des pauvres de la nature, à qui elle avait donné un titre pour être entretenu par les membres de sa propre espèce, lequel titre était justement cette difformité qui le privait de tout autre moyen de se suffire par son propre travail. En outre, il y avait un sac qui était suspendu au moulin pour être rempli au profit de Davie Ritchie, et ceux qui remportaient leur farine manquaient rarement d’en verser une poignée dans le sac éléemosynaire du pauvre estropié. En un mot, Davie n’avait jamais besoin d’argent, excepté pour acheter du tabac à priser, seul plaisir qu’il cherchât à se procurer, et dont il jouissait amplement. Lorsqu’il mourut, au commencement de ce siècle, on trouva qu’il avait amassé une somme de vingt livres sterling, manie qui s’accordait parfaitement avec son caractère ; car être riche c’est avoir du pouvoir, et le pouvoir était ce que Davie Ritchie ambitionnait le plus de posséder, comme une compensation de son exclusion de la société humaine.

Sa sœur lui survécut jusqu’à la publication du conte auquel cette courte notice sert d’introduction. L’auteur a appris avec peine qu’une sorte de sympathie locale et la curiosité que le public manifesta dans le temps concernant l’auteur de Waverley et des sujets de ses contes, ont exposé cette pauvre fille à des recherches et à des questions qui lui ont causé des désagréments. Lorsqu’on la pressait de donner quelques détails sur les singularités de son frère, elle demandait pourquoi on ne voulait pas laisser les morts reposer en paix, et lorsque d’autres personnes lui demandaient des renseignements au