Page:Scott - Le nain noir, Le miroir de ma tante Marguerite, trad Montémont, 1916.djvu/167

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dans le cas contraire, il était un homme perdu, tous ses scrupules s’évanouirent.

Il trouva miss Vère assise près de la fenêtre de son cabinet de toilette, la tête appuyée sur une main ; ou elle sommeillait, ou était tellement plongée dans la méditation, qu’elle n’entendit point le bruit qu’il fit en entrant. Il s’approcha en donnant à ses traits une expression profonde de chagrin et de sympathie, et, s’asseyant auprès d’elle, appela son attention en lui prenant doucement la main, mouvement qu’il ne manqua pas d’accompagner d’un profond soupir.

« Mon père ! » dit Isabelle avec une sorte de tressaillement qui exprimait autant de frayeur que de joie et de tendresse.

— Oui, Isabelle, votre malheureux père qui, plein de repentir, vient demander pardon à sa fille d’une offense dont il s’est rendu coupable envers elle par excès de tendresse, et lui faire ses adieux pour toujours.

— Mon père ! une offense envers moi ? Faire vos adieux pour toujours ! Que signifie tout ceci ?

— Oui, Isabelle, je parle sérieusement ; mais, avant tout, je vous demanderai si vous ne soupçonnez pas que j’étais dans le secret de l’aventure qui vous est arrivée hier matin ?

— Vous, monsieur ! » dit en bégayant Isabelle, partagée entre la conviction qu’il avait justement deviné sa pensée, et la honte, aussi bien que la crainte, qui lui défendaient d’avouer un soupçon aussi humiliant et aussi peu naturel.

« Oui, continua-t-il, votre hésitation est un aveu tacite que vous aviez cette pensée, et j’ai maintenant la tâche pénible de reconnaître que vos soupçons n’étaient point mal fondés. Mais, écoutez mes raisons. Dans un moment malheureux, j’encourageai la recherche que sir Frédéric Langley faisait de votre main, ne concevant pas qu’il fût possible que vous eussiez aucune objection valable à me faire contre