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Le Nain Noir

— Le danger de mon père et votre propre recommandation », répondit-elle d’une voix faible, mais avec fermeté.

« Et vous attendez de moi du secours ? dit le Solitaire.

— Si vous pouvez m’en accorder », répondit-elle du même ton de douceur et de soumission.

« Et comment le pourrai-je ? » dit le Nain avec un sourire amer. « Ai-je la tournure, l’air d’un redresseur de torts ? Est-il probable qu’un homme assez puissant pour qu’une belle suppliante vienne lui faire une visite ait choisi ce château pour le lieu de sa résidence ? Je n’ai fait que me moquer de toi, jeune fille, lorsque je t’ai dit que je voulais te secourir.

— Alors il faut que je parte, et que j’affronte ma destinée avec autant de courage que je pourrai », répondit Isabelle en faisant un mouvement pour s’en aller.

« Non », dit le Nain en se levant et se plaçant entre elle et la porte, et lui faisant un signe impératif de reprendre sa place : « Non, vous ne me quitterez point ainsi ; il faut que nous ayons une plus longue conférence ensemble. Pourquoi un être demande-t-il du secours à un autre ? Pourquoi ne se suffit-il pas à lui-même ? Regardez autour de vous. Moi, l’être le plus méprisé et le plus disgracié de la nature, je n’ai demandé ni compassion ni secours à qui que ce soit. Ces pierres, c’est moi qui les ai entassées les uns sur les autres ; ces meubles, c’est moi qui les ai fabriqués de mes propres mains ; et avec ceci », ajouta-t-il en posant la main sur la longue dague qu’il portait toujours sous son vêtement, et qu’il tira assez pour que la lame brillât à la lueur du feu ; « avec ceci », poursuivit-il en la replongeant dans le fourreau et en se montrant, « je puis au besoin défendre l’étincelle de vie renfermée dans cette misérable machine, contre l’être le plus féroce et le plus fort qui oserait m’attaquer. »