Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/521

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l’on laiſſe, eſt moins belle & moins parfaite que celle que l’on choiſit. Du moins reprit Leoniſe en ſous-riant, faudroit il auparavant que je vous eſcoutaſſe, que vous m’euſſiez permis de m’informer bien exactement, ſi je ſuis la plus belle & la plus accomplie Perſonne de Suſe : car Beleſis ſi cela n’eſt pas, & qu’au contraire je vous prouve qu’il y en a un nombre infini de plus aimables que moy, il ne ſeroit pas juſte que j’allaſſe recevoir voſtre affection pour la perdre dés le lendemain. Cruelle Perſonne, luy dit il, ne me traittez pas ſi rigoureuſement : & ſouvenez vous s’il vous plaiſt, que puis que je vous aime plus que je n’ay jamais aimé Cleodore, je n’aimeray jamais rien que Leoniſe : eſtant certain que pour avoir arraché mon cœur d’entre ſes mains, il faut que vous ayez eu une puiſſance, que nulle autre ne sçauroit ſurmonter. Quoy qu’il en ſoit, reprit elle, je penſe eſtre obligée de vous dire, que ſi ce que vous dittes eſtoit vray, vous en ſeriez plus malheureux : eſtant certain qu’il n’eſt rien que je ne fiſſe, pour vous punir de l’inconſtance que vous auriez euë pour Cleodore. Du moins, luy dit il, ne me refuſerez vous pas d’ajouſter foy à mes paroles : je vous refuſeray tout ce que vous me demanderez, repliqua t’elle. Quoy, reprit Beleſis, je pourrois croire que vous ne me croyez point, & je pourrois penſer que me croyant vous ſeriez touſjours inexorable ! Vous le devez ſans doute, reſpondit elle, car je ſuis abſolument reſoluë de ne vous donner jamais lieu de penſer que je fuſſe capable de prendre plaiſir à eſtre aimée. Quoy Leoniſe, interrompit il, vous me refuſerez toutes choſes, & ne me donnerez jamais rien de ce une je vous demanderay, non pas meſme un peu d’eſperance ! Ha, pour l’eſperance,