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Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/155

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de Gaspard, qui était parti de suite pour faire la commission de son père.

Thomas.

Hé, hé, Lucas, il est pourtant bon d’être savant ! Si Gaspard n’avait pas étudié, j’aurais perdu six pieds de terrain tout le long de ma pièce, et ma haie et mon fossé. Toi, tu n’as jamais aimé à étudier, et tu as eu tort.

Lucas.

Non, père, je ne le pense pas. Ne vous faut-il pas quelqu’un pour vous aider à la ferme, qui prenne intérêt à vos affaires, qui vous serve fidèlement, qui vous remplace quand vous êtes malade ou absent ?

Thomas.

Je ne dis pas non ; mais vois ce que gagne Gaspard à seize ans. Il a cinq cents francs maintenant ; dans dix ans, il en aura peut-être six mille.

Lucas.

C’est possible ; mais si j’avais fait comme Gaspard, qui est-ce qui resterait près de vous dans vos vieux jours ? Qui est-ce qui ferait marcher la ferme ? Qui est-ce qui habiterait cette terre où vous êtes né, où est né mon grand-père ? Non, je ne regrette pas de vous avoir servi comme je l’ai fait, et je compte bien ne jamais vous quitter et mourir chez vous.

Thomas.

Ou chez toi, car tu penses bien que c’est toi qui auras la ferme après nous.