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Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/275

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nouveau père m’aime bien réellement ; de moi seul dépend la solidité et même l’augmentation de l’amitié qu’il me porte. Comment reconnaîtrai-je toutes ses bontés ?

« Dans ces moments qui devraient être les plus heureux de ma vie, pourquoi mon cœur n’est-il pas encore rempli ? Où trouverai-je la satisfaction complète qui me manque ? Où est la tranquillité que donne le parfait bonheur ? Ma reconnaissance pour mon bienfaiteur me procure seule quelques instants de calme… Ma vie jusqu’à présent n’a été remplie que par le travail : l’ambition, qui m’a poussé sans cesse vers le but que j’ai atteint ne me laisse qu’un bonheur incomplet. Il me faut plus encore ! Les goûts, les idées et les habitudes de ma famille sont opposés aux miens ; elle me devient de plus en plus étrangère. Pouvait-il en être autrement ? Si là du moins j’avais un ami qui eût toute ma confiance, auquel je pourrais demander des consolations et des conseils ! Mais je ne connais pas l’amitié : une liaison dans les ateliers pouvait sinon me perdre, du moins, me compromettre… La messe de ce matin m’a laissé une singulière impression que je ne puis définir. Il me semble avoir mal employé mon temps jusqu’ici. Pourtant j’ai toujours été honnête ; mon assiduité au travail et mes services m’ont donné la situation à laquelle je suis parvenu. Que pouvais-je faire de plus que ce que j’ai fait ? »

Enfin la fatigue finit par l’emporter sur l’agita-