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Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/297

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le regarda d’un air si affectueux, que Gaspard fut enchanté d’avoir si bien parlé.

« Allons-nous écrire à notre mauvais drôle, mon père ? dit Gaspard en s’asseyant près de M. Féréor.

M. Féréor.

Gaspard, j’y ai longuement songé ; je n’ai, pour ainsi dire, pas pensé à autre chose depuis que je t’ai quitté. Je trouve que la chose n’est pas faisable. Tu as vingt-cinq ans ; tu as un long avenir devant toi. Cette femme et ce beau-père pèseront sur ton cœur, sur ton esprit, sur ton bonheur. C’est impossible ! Je te le répète, c’est impossible ; ce serait pour moi un trouble dont ma santé même souffrirait. N’y pensons plus et tâchons de nous en tirer autrement.

Gaspard.

Mon père, ces gens-là ne pèseront pas sur mon cœur, car je n’en ai pas pour eux, je n’en ai que pour vous ; ils ne pèseront pas sur mon esprit, parce que je ne m’occuperai du père que pour les affaires de l’usine ; ils ne pèseront pas sur mon bonheur, car je compte sur votre bonté et votre générosité accoutumées pour donner à la femme de quoi me laisser tranquille, n’avoir rien à me demander, et n’avoir aucun contact avec moi. Le père sera pour vous un fripon comme un autre ; nous serons en affaires avec lui ; nous l’enverrons le plus possible dans les bureaux. Ce mariage nous donnera la sécurité que nous risquons de perdre.