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Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/322

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se tournaient avec complaisance vers Gaspard : la pensée de la reconnaissance que lui témoignait son fils adoptif par le sacrifice de son bonheur intérieur, lui donnait un sentiment de calme et de bonheur. En voyant toutes les joies et toutes les consolations que procure une bonne action, il songea au bien qu’il aurait pu faire autour de lui, à toutes les bénédictions qu’il aurait attirées sur sa tête, à la vénération et au respect qu’il aurait pu inspirer. Sa résolution fut prise ; son âme, touchée par la grâce divine, comprit que dans la pratique seule du bien il devait trouver le bonheur au milieu des richesses.

Gaspard songeait à la différence de ses sentiments pour le père qu’il venait de perdre et pour celui qu’il priait Dieu de lui conserver ; du premier il n’avait eu que des duretés, des réprimandes et des coups ; du second il n’avait reçu que de l’affection, de la confiance et une position magnifique. De temps à autre, quand ces pensées revenaient plus vives, il serrait machinalement la main de M. Féréor qu’il avait, sans y penser, prise et gardée dans la sienne. M. Féréor, d’abord surpris, devina les sentiments qui agitaient son fils, et il se laissa doucement aller au bonheur, nouveau pour lui, d’une affection vraie.

Le surlendemain fut encore une journée pénible pour Gaspard, fatigante pour M. Féréor, et cruelle pour Lucas et pour sa mère. Cette séparation absolue d’un père et d’un mari les impres-