Page:Senancour - Rêveries sur la nature primitive de l’homme, 1802.djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 277 )

fleurir, se refroidir après une vaste durée ; et enfin mort, inanimé, se livrer aux forces étrangères pour être dissous par elles, et servir à la formation des mondes nouveaux.

Dans les choses humaines ses doutes deviendront des probabilités, quelquefois des certitudes. Dans un espace si étroit, dans une durée si courte, la raison peut espérer de tout voir ; et le flambeau philosophique pourra démasquer un jour tous les fantômes de la partialité. Là, dans les opinions anciennes, l’on trouve nos dogmes nouveaux ; toutes nos erreurs, dans la lente altération des vérités primitives ; les fléaux dévastateurs, dans l’abus des institutions heureuses ; et les peuples modernes opprimés par les bienfaits d’hommes antiques. Les traces anciennes se découvrent sous les pas des Bailly, et s’interprêtent par la science des Gebelins. Les fables que l’on prétendoit absurdes, deviennent les allégories de la vérité ; et l’erreur audacieuse n’insulte plus à la sagesse des tems meilleurs. Le scepticisme dévoile les préjugés, et des principes féconds montrent à leur place des vérités long-tems méconnues. Les Bayle, les Freret, les Boulanger, pèsent les probabilités et cherchent la raison première des choses.