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Les organes de l’homme répètent plus facilement ce qu’ils ont déjà exprimé[1], et c’est une raison de choix pour l’être à la fois avide et limité, qui veut produire le plus possible avec le moins d’efforts et de moyens[2].

L’habitude ou le penchant pour les choses accoutumées, n’est autre chose que le choix de la sensation, de l’action, de la jouissance la plus facile ; elle reçoit son pouvoir du concours des deux besoins, celui de l’activité et celui du repos…

L’habitude ne peut remplacer ou changer la loi de la nature, mais elle est elle-même sa loi dans toutes les choses d’un ordre secondaire, dans tout ce qui n’est pas d’une néces-

    tères foibles, doux, tendres, paresseux ; beaucoup moins sur les âmes fortes, actives, audacieuses.

  1. Dans les pays simples l’on a très-peu d’usages, très-peu de besoins et de désirs. Comme on y use de moins de choses, chacune y revient plus souvent et plus constamment. Le sort de tous les hommes y est à peu près semblable ; ainsi l’on ne voit, l’on n’imagine et dès-lors l’on ne cherche guères que ce dont on a toujours usé. Les affections, moins partagées à tous égards, sont beaucoup plus fortes ; et le goût des choses présentes et faciles s’accroît surtout par le silence de l’imagination pour les choses nouvelles ou difficiles.
  2. Intention que l’on a plaisamment prêté à la nature, mais qui ne peut être qu’un art de la foiblesse, et ne peut appartenir qu’à l’être partiel.