Page:Senancour - Rêveries sur la nature primitive de l’homme, 1802.djvu/80

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pêtres inconnues aux hommes moins simples que lui ; c’est-là que tu prépares son repos, et pour combler ses derniers vœux, tu lui souris jusques sous les frimats que tu suspends comme pour lui promettre et lui montrer déjà le printemps réparateur.

Douce automne ! c’est toi que la nature à destinée au soutien, à la consolation, aux délices des victimes sociales qui vivent encore pour elle. Tu la fais aimer, tu ramènes à ses lois oubliées, tu es touchante comme le soir d’un beau jour, consolante comme le soir de la vie, et tes émotions chéries se perpétuent dans le vague des souvenirs, et agrandissent notre être dans l’abîme du regret inénarrable.

Vous, à qui les touchantes soirées d’octobre conviennent davantage qu’un matin du mois de mai, comptez que la vie a déjà perdu pour vous son illusion fugitive ; que les regrets seront vos seuls plaisirs, et qu’il n’est plus d’autre habitude du cœur qu’une mélancolie qui consume et que l’on aime. Le charme une fois dissipé ne revient jamais. Vous êtes dans le soir de la vie, et son couchant se prépare. Descendez doucement vers la nuit de la tombe : il n’est plus pour vous d’aurore ; vos yeux fatigués ne verront pas même l’éclat du