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SCÈNE II.

bradshaw.

Ah ! Will, les temps sont changés ; nous ne sommes plus camarades à présent, quoique nous ayons été ensemble sur le champ de bataille ; pourtant je reste ton ami suffisamment pour te rendre un service.

blackwill.

Bah ! Bradshaw, n’avons-nous pas été tous deux compagnons d’armes à Boulogne ? J’étais caporal, quand tu n’étais qu’un vil mercenaire. Et maintenant nous ne serions plus camarades, parce que vous êtes orfèvre et que vous avez un peu d’argenterie dans votre échoppe ! Autrefois vous étiez bien aise de m’appeler camarade Will, et vous me saluiez jusqu’à terre en me disant : Un morceau, bon caporal ! alors que je volais la moitié d’un bœuf à John le vivandier pour m’en régaler un soir avec de bons lurons.

bbadshaw.

Oui, Will, ces jours sont passés pour moi.

blackwill.

Oui-dà, mais ils ne le sont pas pour moi. Car je garde toujours les mêmes goûts honorables. Ainsi, voisin Bradshaw, vous êtes trop fier pour être mon camarade ; mais moi, si je ne voyais pas un surcroît de compagnie descendre la colline, je ferais volontiers avec vous un dernier acte de camaraderie, en partageant avec vous vos écus. Mais laissons cela, et dites-moi où vous allez.

bradshaw.

À Londres, Will, pour une affaire où tu pourras peut-être m’être utile.

blackwill.

De quoi s’agit-il ?

bradshaw.

Dernièrement, lord Cheiny perdit de l’argenterie qu’un individu m’apporta et vendit à ma boutique, disant qu’il